Les journalistes et les groupes de jeunes déçus

Tiens, ce matin, je tombe sur une pignouferie de presse au carré : une pignouferie de presse qui parle de pignoufs de la presse. C’est assez ultime, comme procédé…

Il s’agit d’une brève. Très courte. Très peu reprise par les agences diverses et variées. Très peu commentée, donc.

Pignouferies de la Presse

Composée de deux paragraphes, nous n’aurons donc qu’assez peu d’informations à nous mettre sous la dent. Mais en gros, voici ce que ça donne :

Une journaliste et un caméraman de France 3 ont été aspergés de gaz lacrymogène, ce jeudi, par un groupe de jeunes gens à Villepinte (Seine-Saint-Denis), une commune limitrophe de Tremblay-en-France dans laquelle trois bus avaient été caillassés la nuit dernière.

Les gras sont de moi. Ici, on comprendra en Français courant décrypté que “un groupe de jeunes gens” s’entend comme “une bande de petite racailles”

Il est amusant de noter que ce phénomène hyper-banalement-quotidien de l’environnement du jeune Francais actuel est complètement absent du monde journalistique. Nature & Découverte ! Le petit scribouillard, caméra à l’épaule, se risque alors à tenter un passage rapide dans certains points chauds en s’imaginant que sa carte de presse lui servira de blason protecteur…

Oui mais voilà : n’est pas Harry Roselmack qui veut…

Pour rappel, la racaille – en bande ou seule, aussi appellée zyva ou yo – c’est cette espèce spécifique d’individu qui fout sa merde partout ou elle passe, réputée dans les soirées publiques ou privées, un classique de la Fête de la Musique, de la TechnoParade, de toutes les fins de Prides bigarrées, une peste des bals pops qui sont devenus infréquentables depuis belle lurette, un délice dans les fêtes foraines – fêtes de la dépouille – , une douce présence amicale dans le métro, à la gare, à la plage, etc… La multiplicité des situations permet d’aborder chaque nouvel endroit en sachant que, si on tombe sur de la petite racaille, on aura la joie de participer à l’une de ces expériences sociologiques que, justement, le bobo parisien journaliste ne tente qu’assez rarement.

Pour ces derniers, il n’existe qu’un jeune :  le djeunz, souvent déçu, toujours demandeur de compréhension sociale, toujours ou presque en difficulté ou bien bon-élève-mais-de-mauvaise-famille, toujours sympa, une peu bad-boy mais avec un bon fond, souvent attachant comme un jeune chiot fou.

Les autres, les normaux, bons  élèves de bonne famille ou juste de famille standard, on n’en parle pas. Ils n’existent pas, ou alors ils sont de sales petits gosses de riches sarkoziens ; mais alors, c’est extrêmement rare qu’on en parle, hors reportage sur les jeunesses sarkozystes remplis de Charles-Edouard et Marie-Charlotte ridicules.

L’univers médiatique français que le monde nous envie ne sait plus rien répéter d’autre que Jean Valjean et les Misérables appliqués à toutes les sauces, tout le temps.

Il est à ce propos risible d’entendre un Zemmour tenter d’expliquer la sociologie de ces bandes (avec ou non de bons arguments, peu importe ici) alors que la plupart de ses confrères n’ont même pas encore accepté leur existence : comme résultat,  il se retrouve à parler des bandes de dealers qui n’ont que marginalement à voir avec le sujet. Et on se souviendra de l’amusante polémique qui en avait découlé.

D’une certaine façon,  c’est exactement comme pour le fonctionnement de la société en général, entièrement basée sur un Etat omniprésent: on refuse de voir la vérité, les dégâts causés, les dérives multiples, répétitives et systématiques, on met régulièrement un mouchoir dessus avec un petit “C’est la fautapadchance” qui s’apparente beaucoup au discours “Célassociété qui les pousse à ça”.  Et celui qui pousse le rideau se fait lyncher (aux cris, notamment, de “ultranéolibéral”, “salcapitalisse”, “réactionnaire”, etc…)

L’habitude de ne plus voir dans les exactions des barbares, des crevures et des raclures qui émaillent, de ci, de là, l’actualité, que des réactions quasi-normales ou du moins compréhensibles, est à ce point infusée dans la société que même lorsqu’on est directement confronté à la réalité, dans sa chair, on se rattache quand même à l’explication générale : ce n’est pas leur faute, c’est la fotalassociété, il y a trop de différence entre les riches et les pauvres, et on a tout fait pour que ça arrive alors bon c’est triste mais on ne leur en veut pas.

Le Dauphine

Simple, non ?

On vous pète la gueule ? C’est parce que vous étiez trop beau, trop propre sur vous ! L’inégalité flagrante de vos habits propres et quasi-neufs, de votre portefeuille normalement rempli et de votre portable encore couvert par sa garantie détonnait violemment avec la misère crasse dans laquelle vous vous promenez ! Vous narguiez, vous payez !

On vous tabasse et on vous viole ? C’est, là encore, parce que vous avez tout fait pour !

Il semble cependant que ce discours ne résiste pas à l’analyse des faits (nooooon ?! Sans blague !)

La réalité, c’est que les gens les plus pauvres ne sont pas les plus violents, loin s’en faut. L’intéressante petite vidéo ci-dessous donne quelques éléments édifiants de réflexion :

Pour en revenir à mes deux journalistes molestés à Tremblay, je conclurais par deux éléments.

Le premier, c’est qu’il faut, absolument, que les victimes trouvent réparation, c’est-à-dire qu’on chope les coupables et qu’on les punisse. Il va de soi qu’en France, de nos jours, ceci est un vœu pieux. Ce qui donne au passage une bonne idée de pourquoi tout ceci continue.

Le second, c’est qu’un fait divers de la sorte permettra peut-être à nos deux joyeux détenteurs d’une carte de presse de se rendre compte du quotidien vécu par les gens du voisinage. Peut-être comprendront-ils enfin que le discours qui consiste à minimiser systématiquement les insupportables atteintes à la personne que ces faits divers recouvrent, en les travestissant dans des expressions comme “incivilités” et autres “petits délits”, à cacher la nature crapuleuse et/ou barbare des actes effectuées en enrobant le tout par des idiomes lénifiants à base de “groupe de jeunes gens“, ces discours, qu’on retrouve ensuite partout, dans la presse, jusque dans les pensées profondes des victimes elles-mêmes, ne sont rien d’autre qu’une absence totale de lucidité et de courage pour regarder la vérité en face : il ne peut plus être question d’autre chose, maintenant, que de fermeté.

Mais là encore, je crains qu’il s’agisse encore d’un vœu pieux.

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Commentaires17

  1. Winston the only (other) one

    Ce n’est jamais bon de s’en prendre à cette corporation ultra-susceptible qu’est la presse. Peut-être le début de la fin de leur histoire d’amour avec la caillera…

  2. Patchan74

    Bonjour,

    Juste une petite anecdote pour illustrer vos propos.

    J’ai vécu plus de 15 ans au quartier Canal dans la ville nouvelle d’Evry, quartier que mes parents ont quitté vers 1997 pour des cieux plus cléments…

    J’occupais alors une partie de mes loisirs à me rendre sur un terrain de basket extérieur rejoindre mes amis ou mes connaissances pour jouer soit au basket soit au volley-ball.

    Je me souviens qu’au cours d’une de ces journées avoir écouté le récit d’un camarade d’origine africaine qui revenait des USA où il y avait séjourné quelques jours chez de la famille installé là-bas.

    Je tiens tout de suite à préciser que contrairement aux clichés véhiculés par les médias traditionnels, toutes les personnes d’origine immigrée vivant en banlieue ne sont pas forcément démunie mais passons.

    Cette connaissance exposait à qui voulait bien l’écouter ses premières impressions ressenties dès son arrivée à l’aéroport international de New-York (je crois)sur un ton plutôt joyeux :

    ” … les flics, dès qu’ils nous ont aperçus ils nous trop pourri la vie mais là-bas, c’est pas comme en France, ils sont beaucoup plus balaises, plus grands et plus gros et t’as intérêt à les écouter parce que si ca tourne mal personne ne viendra t’aider, personne ne se rebelle contre la police là-bas…”

    En gros, dès son arrivée aux USA il a rapidement compris que la fête du slip était suspendue pour au moins le temps de son séjour ce qui ne l’a pas empêcher d’apprécier son séjour vraisemblablement.

  3. Flo

    Faudrait savoir :

    La famille dit que c’est un déchainement de violence à cause de la société qu’elle est méchante et inégalitaire et tout et tout et le jeune dit que c’est un accident :

    “Agé de 20 ans, l’auteur présumé des coups de couteau, qui a reconnu avoir “involontairement” poignardé la victime”
    (Lé Dépèche, Paris-Match…)

    Comment une société aussi inégalitaire soit-elle pourrait-elle provoquer des accidents de “poignardage”?

  4. car

    Il est temps de revenir aux vérités éternelles :

    1 – La déliquance provoque la misère, et non l’inverse.

    2 – La répression engendre la prévention.

  5. Hko

    Je pense que ton analyse est fausse au niveau de la misère. Pourquoi n’y a-t-il pas ou moins de délinquance dans ces zones classées comme les plus pauvres? Par ce qu’ils sont tous dans le même panier, il n’y a pas le petit bourgeois de la ville pour le narguer du haut de ses marques et de tous ses accessoires. De plus pour en revenir à la délinquance, il me semble que si ces jeunes gens (comme énoncé par les journalistes) agissent de la sorte, se retrouvant en proie à la violence pour obtenir ce qu’ils désirent, c’est par ce qu’il leur manque une éducation qui fait qu’ils se sont eux même exclus du système par effet de groupe et ne voit pas d’autres voies. C’est sans compter les rapeurs qui font l’apologie de la violence et de la barbarie et les réconforte dans cette idéal de violence maîtresse. Et puis l’image que renvoie l’Etat d’une société basée sur la consommation et l’épanouissement personnel par une soumission totale aux normes y est également pour quelque chose. Bref ce n’est qu’une réaction sommaire, ça n’a rien d’absolu et je suis ouvert à toute discussion.

    1. “Pourquoi n’y a-t-il pas ou moins de délinquance dans ces zones classées comme les plus pauvres? Par ce qu’ils sont tous dans le même panier, il n’y a pas le petit bourgeois de la ville pour le narguer du haut de ses marques et de tous ses accessoires.”

      Bah non. Prends le Nord, tu y trouves parmi les plus grandes fortunes de France et la plus grande misère, pourtant, les violences sont nullement comparables à celles qu’on observe en région parisienne par exemple. En outre, ces “jeunes gens” qui font des actes de plus en plus barbares sont rarement issus des familles les plus pauvres ; ils ont généralement des habits neufs ou en bon état, plusieurs repas chauds dans le ventre, les cheveux coupés, un téléphone portable, etc… On n’est plus du tout dans le registre du voleur qui agit pour se nourrir. On a dépassé depuis longtemps le schéma à la Dickens.

      Le côté “il leur manque une éducation”, c’est ce que j’entends depuis 30 ans. Et les ZEP ont fleuri, les équipements sportifs aussi, et … La violence continue. Mon sentiment reste toujours le même et de plus en plus confirmé par à la fois mon observation personnelle et à la fois les quelques études qui arrivent à émerger malgré le blackout médiatico-bien-pensant : ce n’est plus d’éducation donc on a besoin dans ce pays, mais de francs et massifs coups de pieds aux culs, quelques lattages en bonne et due forme.

      Ton discours serait valable s’il avait été tenu fin des années 70, par exemple. Maintenant, on a du recul sur l’idée générale qu’il faut “éduquer” et “prévenir” : ça ne marche que si la certitude d’une sanction plane. Autrement dit, tant qu’il n’y aura pas de sanctions, tant qu’il n’y a pas une application ferme de la loi, tout le reste, c’est de la fanfreluche.

      1. Hko

        Je maintiens que le problème est l’éducation et l’effet de groupe. L’éducation d’une part car elle est reniée par ces personnes et empêchent ceux qui voudraient se cultiver de le faire sous peine de ne pas appartenir à la mentalité dominante. Et si l’on y regarde bien les personnes agissant ainsi ont peu conscience des mécanismes juridiques et n’ont aucune idée du monde qui les entoure, ils raisonnent “local”. L’effet de groupe d’autre part, dans la mesure où si un s’en sort comme ça pourquoi ne pas faire comme lui? Il est vrai que cette délinquance ne touche pas ceux qui sont vraiment pauvres, car contrairement à eux elle touche le type même de personnage qui aime se démarquer avec les derniers habits fashion rakai (qui sont, somme toute, hors de prix). Il semblerait donc que l’on ait affaire à une catégorie sociale qui n’est pas caractérisée par la pauvreté et la désespérance, mais par l’épanouissement personnel du matériel financé par le larcin. Ce que je ne cautionne pas, et c’est pour cela que je te rejoins sur le durcissement des sanctions. C’est sans compter les enfants de bonne famille qui se prennent à ce jeu, comme si la jouer gangster était une mode. Je pense que l’on peut attribuer ces comportements à une branche artistique déviante érigeant le crime comme un fait d’arme rendant l’homme respectable parmi les siens.

        1. Il y a aussi l’effet de groupe, et il y a aussi l’effet de mode, certes certes. Mais le premier effet, c’est l’appel d’air constitué par l’absence de sanction.

          En fait, l’éducation ne peut se faire que sur un terrain propice, terrain qui nécessite l’ordre.

  6. Toni

    h16 a écrit : “ce n’est plus d’éducation donc on a besoin dans ce pays, mais de francs et massifs coups de pieds aux culs, quelques lattages en bonne et due forme.”
    Si une crise assez grave parvient à éclater en France, c’est tout le monde qui aura droit à ce traitement … Je ne pense pas que tellement de privilégiés pourront prendre la chaloupe de sauvetage et s’expatrier parce que les grévistes tout comme les casseurs ne savent en général rien faire de leurs 10 doigts et je ne pense pas que les pays étrangers veuillent d’eux.
    Ce qui est quand même gonflant; c’est que tout le monde va se retrouver dans la mouise à cause d’une minorité de biens pensants qui ne veut pas voir la réalité.

  7. Toni

    Sinon par rapport à l’excellent lien sur le mot fermeté en fin d’article, c’est surtout aux parents en premier lieu puis ensuite à nos élus et à la justice qu’il faudrait demander des comptes.
    Le truc que j’ai déjà dit à autre part, c’est que certains individus devraient s’abstenir d’avoir des gosses. Parce que là on voit les gosses, mais allons voir les parents de ces gosses de plus près … le spectacle vaut le détour à mon avis. Le fait de voir comment se comportent les parents peut aider à comprendre la psychologie des gamins.

    Ceci étant dit, je n’excuse pas les gosses de cet article. Ils sont absolument ignobles … On devrait même organiser des safaris dans ces zones de non droit. Parce que entre les varans de Komodo et cette gente là, je ne vois pas trop la différence. C’est bien quand même, plus besoin de prendre l’avion pour aller en safari.

  8. Théo31

    “Mais là encore, je crains qu’il s’agisse encore d’un vœu pieux.”

    C’est malheureusement ce qui a été envisagé par la couille molle de la place Beauvau. Au lieu de traquer les racailles qui foutent la merde, on va mettre plus de flics pour accompagner les bus. Les bus se feront caillasser pareil mais on aura mis le paquet pour protéger la population. Alors on mettra encore un peu plus d’accompagnateurs et ainsi de suite. Les débilocrâtes nous sortiront ensuite les grands rapports dont ils ont seuls le secret. Et on s’étonnera de la remontée du FN.

  9. Démocrate

    Affrontement entre jeunes dans une maison de repos: une jeune de 98 ans a trouvé la mort:

    Une femme de 98 ans est morte mardi soir à la résidence Les Marronniers. Peu avant, elle avait eu une altercation avec une femme de 91 ans, blessée et hospitalisée

    Une femme de 98 ans morte sous ou à la suite des coups d’une autre femme de 91 ans. C’est la scène inédite qui se serait déroulée mardi soir au foyer-résidence Les Marronniers, la maison de retraite de la Croix-Rouge située au centre de Rouillac, entre l’église et le champ de foire.

    Si les enquêteurs avancent pour l’heure avec la plus grande prudence, c’est bien ce scénario qui semble avoir été fatal à Madame Quesnel, une pensionnaire du foyer-résidence âgée de 98 ans. «Nous avons déployé d’importants moyens d’investigation dès le départ mais nous n’écartons aucune hypothèse», dit avec prudence le colonel Yann Tréhin, patron des gendarmes charentais. L’enquête a été confiée à la brigade de recherches de Confolens.

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