Le compte n’est pas bon mais les jeux sont faits

Pendant que ça se dispute méchamment au sommet de l’État au point de menacer franchement l’esprit câlin de la République du Bisou Gentil, la proposition de budget gouvernemental pour l’année 2011 poursuit son chemin en passant devant la Commission des Finances du Sénat, dans une discrétion qui, par contraste avec les chamailleries villepinesques, laisse songeur quant aux priorités que les médias attribuent aux événements en cours…

Et à la lecture du projet de loi des finances, Jean Arthuis, le président de la Commission sénatoriale des Finances, a été obligé d’intensément dodeliner de la tête en murmurant que “non non non, tout ceci n’est pas très très sérieux enfin bon franchement hem”.

Relevant la tête et inspirant un bon coup, sans doute tout remonté à l’intérieur de lui-même d’avoir en face de la truffe un de ces gros micros mous journalistiquement propulsé là, il a même été jusqu’à déclarer, sans honte :

« La rigueur promise n’est pas au rendez-vous.»

Constatation assez juste et qu’on pouvait d’ailleurs faire sans même regarder la proposition de loi en question : en effet, pour ceux qui gouvernent, ou ceux qui sont en haut des pyramides hiérarchiques (syndicats, partis, administrations et entreprises très amies du capitalisme d’état), la rigueur ne semble pas à l’ordre du jour.

Cette constatation posée, et pendant que le grand tout fou s’écharpe avec le petit tout nerveux sur fond des cris de chochottes baroinesques, tentons de comprendre ce que veut dire Arthuis. Pour lui, en effet, le compte n’y est pas : au lieu d’un solide 5% de diminution des dépenses de l’Etat, il constate, les doigts encore gourds de longues nuits à tripoter sa calculette pour bien refaire les calculs, que sapristi, on n’arrive en fait qu’à 1%, et encore, en bavant un peu.

Si l’information d’un tel dérapage budgétaire était parvenue aux oreilles de Baroin, on imagine aisément les stridulations insupportables et pas du tout bisounours qu’il aurait poussées. Et c’est probablement pour cela que le gentil Arthuis, cherchant sans doute à ménager les cœurs sensibles qui nous gouvernent, a sérieusement mâtiné ses premières remarques.

Ainsi, s’il s’étonne de l’absence quasi-totale d’effort ou de rigueur, il convient cependant que, parlant des discours politiques du chef de l’Etat et de la volonté affichée, …

« Nous commençons à devenir lucides,»

A la bonne heure ! Nous continuons à dépenser sans compter, nous allons, en 2011, fabriquer de la dette au même rythme industriel soutenu qu’en 2010, 2009 et 2008, mais nous commençons à devenir lucides. Entendez-le bien : “commençons”. On peut subodorer, d’ores et déjà, un chemin long et sinueux pour passer de l’étape initiale du retour à la lucidité vers l’étape suivante, la lucidité pleine et entière ; en quelque sorte, la camisole chimique qui encotonnait le malade dans un douillet matelas de dettes publiques va se retirer progressivement, prochainement, et, petit-à-petit, l’illusion du magnifique hôtel particulier aux dorures chatoyantes dans un soleil d’été va laisser place à une cabane en planche humide au fond d’un jardin en friches par un mois de novembre pluvieux.

Pour le moment, nous commençons juste à noter une baisse de luminosité.

Au passage, on peut se demander pourquoi il aura fallu que ce soit la Commission des Finances du Sénat qui fasse le calcul et découvre les petites bidouilles. Les bricolages budgétaires étaient pourtant un peu gros :

« La réduction du déficit de l’État s’explique pour l’essentiel par la fin des mesures de relance, du Grand Emprunt et de la réforme de la taxe professionnelle. L’effort proprement dit reste très modeste.»

Et là encore, on admirera la diplomatie du père Arthuis : l’effort est très modeste. Dans le langage courant, il faut comprendre qu’il n’y a pas d’effort du tout, que ça branlouille le guignol à tous les étages et que tout le monde s’en fiche, du budget, de l’équilibre, de la dette et du reste.

Cependant, cette attitude pose un problème. Et Jean n’est pas en reste pour proposer une solution. Une vraie. Avec des poils, de la testostérone, un truc qui cogne :

« (La hausse des impôts) est à mon avis inévitable, compte tenu de notre incapacité à réduire les dépenses. .»

Inévitable.

Ben voyons, elle a bon dos l’incapacité à réduire les dépenses.

L’aplatissement systématique sur les trente dernières années de tous les pouvoirs devant les chouinements pénibles d’enfants gâtés de mai 68 pour se protéger de tout et n’importe quoi aux frais des autres, l’absence totale de la moindre paire de balloches dans tout le gouvernement actuel et tous ceux qui l’ont précédé sur les décennies passées, tout ça est habilement camouflé par Arthuis derrière le petit cache misère de l’incapacité à réduire les dépenses.

Welfare

Béh non.

Ce qui manque est parfaitement connu : cela s’appelle du courage. Il faut du courage pour dire que oui, les jours où tous les bobos et les accidents de la vie, les ennuis et les pénibilités généreusement pris en charge par la société sont bel et bien terminés. Et ce sera d’autant plus dur que les prises en charges furent généreuses et déficitaires. Ouch.

Ironiquement, le reste du monde regarde la France défiler et s’opposer, vent debout, à toute remise en cause de ses magnifiques systèmes de production de trous, et pendant que ça tergiverse mollement au Sénat et que ça se chamaille puérilement, d’autres pays prennent des mesures autrement plus douloureuses.

On pourra ainsi comparer l’exercice budgétaire français tout en douceur avec celui de la Grande Bretagne, dont le plan de rigueur est un chouilla plus couillu (trop, diront même les Français, rejoignant avec leurs petits hurlements effarouchés les cris maintenant ultrasoniques de Baroin) :

Le chancelier de l’Echiquier, George Osborne, a confirmé l’objectif annoncé en juin pour la réduction des dépenses publiques, alors fixé à quelque 83 milliards de livres (95 milliards d’euros) d’ici à 2015. A cet horizon, la Grande-Bretagne va supprimer 490.000 emplois publics , pour «éviter la faillite» et «s’éloigner du précipice».

95.000.000.000 d’euros de réductions des dépenses, 490.000 emplois publics en moins, on y parle clairement de précipice et de faillite, …

Une question turlupinera alors tout être doué de deux sous de bon sens : si le Royaume-Uni, de taille et de puissance assez comparable à la France, en vient à mettre sur le tapis de telles mesures, alors que, de son côté, la France continue d’organiser des petites joutes rigolotes entre bouffons à l’égo surdimensionné, qui a le plus de chance de limiter la casse, à moyen et long terme ? Lequel des deux pays se met en position de rebondir une fois la crise réellement finie ?

Lequel des deux gouvernements, en réalité, fait preuve de (commencement de) lucidité ?

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Commentaires11

  1. Higgins

    Je n’aime pas le petit nerveux mais bien que je sois très prêt de penser que toute l’agitation récente faisait partie d’un deal au plus haut niveau de l’état entre le pouvoir en place et l’opposition, c’est bien la première fois que dans ce pays, le “pouvoir” de la rue échoue. Ceci dit, rien n’est réglé et nous continuons à nous enfoncer, très franchement depuis trois ans. Quand donc ce produira l’explosion?

  2. kelevra

    l explosion est deja prevue, il suffit d attendre la baisse de la note de la france par une agence de notation. et ca va etre un petard mouille, oh non!!! deja le gouvernement a recu un avertissement alors qu il voulait emettre un emprunt de 100 milliards pour la relance, emprunt qui a disparu comme par miracle depuis. en coulisse les agences de notation ont fait savoir que franchement c etait pas une bonne idee, et l agence chinoise peu connue encore note la france A+ au lieu de AAA. il parait que la catastrophe c est 21 decembre 2012, l explosion de la terre selon les mayas, au vue du budget de l etat, pas sur que l on arrive a cette date!!!!

    1. Théo31

      Il y a déjà eu la dégradation de la note de la SNCF pour servir d’avertissement avec lequel le pouvoir s’est torché.

      Mais bon, les crevures qui nous gouvernent pensent plus aux élections qui arrivent qu’aux problèmes du pays.

      Achetez du plomb !

  3. hank rearden

    La France est irréformable. Les dernières manifs contre la réformette des retraites l’ont clairement démontré.

    Et elle en crèvera… ou plutôt elle ne se relèvera pas de la crise économique en cours. La France de demain , c’est l’Albanie d’hier.

  4. Url

    Et nous n’avons pas 18 mois pour attendre le prochain sauveur Grand Maître en Claquettes.

    Donc un scénario moyen de séries de chocs monétaires, de crises et de mini-réformettes au forceps est de plus en plus probable. Un tunnel de médiocrité et de chienlit qui devrait reléguer en douceur la France au rang d’auditeur libre à l’ONU et aux prochains G20.

    Ca ne doit pas occulter les autres scenarii plus violents bien sûr (faillite claire et nette, sortie de l’Euro, FMI à Paris, etc.)

  5. Herstal

    L’impopularité crasse et persistance du nain (aujourd’hui ailé) fait qu’il est au top du max de ce qu’il pouvait faire dans le genre coup de serviette humide sur les fesses de la populace retraitovore.
    Une idée pour avancer il lui faut deux jambes ; j’te fais rentrer, j’te donne des papiers ; J’te fais rentrer, j’te donne des papiers. ça rappelle quelque chose hein ?
    Et bien pour payer la crisounette c’est pareil ; on vit à crédit en attendant la deuxième partie. Les soces dans leur rôle préféré d’augmenteurs d’impôts vont jouer la deuxième mi temps. ça me parait clair.
    Et comme cette crise ressemble beaucoup à celle de 29 dans sa gestion par les Zélites ; un peu d’inspiration :

    http://www.noslibertes.org/dotclear/index.php?post/2010/11/04/541#comments

  6. XAVIER

    “On peut subodorer, d’ores et déjà, un chemin long et sinueux pour passer de l’étape initiale du retour à la lucidité vers l’étape suivante, la lucidité pleine et entière ; en quelque sorte, la camisole chimique qui encotonnait le malade dans un douillet matelas de dettes publiques va se retirer progressivement, prochainement, et, petit-à-petit, l’illusion du magnifique hôtel particulier aux dorures chatoyantes dans un soleil d’été va laisser place à une cabane en planche humide au fond d’un jardin en friches par un mois de novembre pluvieux.”

    y a des joyaux quand même !

  7. daredevil2009

    Et oui comme vous le dites, Hash : aucun courage, aucune c…es! Mais le mur du réel se profile sûrement à l’horizon et le réveil sera brutal 😉

  8. NOCIF

    Tant que le poulet gonflé à l’hélium remplira les frigos… tout irabiennovitch…
    Salut à vous et coup de pied dans l’frigo.

    Nocif

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