Un article à 4 mains écrit par h16 & Citronne
Ah, voilà que se présente un week-end agréable pour Nicolas, 35 ans, marié et deux enfants (de 8 et 5 ans) : ses parents viennent lui rendre visite dans la maison nouvellement acquise !
C’est un samedi matin qui s’annonce guilleret mais alors que Nicolas est en route pour aller chercher ses parents à la gare de Nantes, il croise des troupeaux de plus en plus nombreux de jeunes aux cheveux multicolores, tenant quelques bout de cartons sous le bras et affublés de t-shirts gribouillés d’inscriptions manuscrites.
Un soupir s’échappe malgré lui lorsqu’il comprend que cette agitation signifie de nouvelles manifestations. Eh oui : la circulation le week-end peut s’avérer parfois aussi périlleuse qu’en heure de pointe en semaine dans la capitale de la région, depuis que les manifestations se multiplient pour toutes les raisons possibles et imaginables.
“Choc des savoirs”, “lutte pour les droits des femmes”, “contre les rétentions d’eau”, “stop au racisme”, … Si Nicolas devait faire le décompte, il arriverait sans doute à plus d’une manifestation par semaine dans la cité des Ducs.
Zigzagant péniblement au milieu de toute cette populace remuante, Nicolas atteint finalement la gare. Sapristi : malgré les retards importants du train de ses parents – dont ils l’avaient informé au cours de leur voyage – ses parents l’attendaient déjà au niveau du dépose-minute : le trafic nantais était vraiment gluant…
Les retrouvailles sont aussi chaleureuses que rapides (il ne faut pas traîner sur zone, une prune est vite arrivée) et la voiture repart vers le domicile de Nicolas, avec une escale très rapide à l’hôtel des parents qu’ils ont choisi cossu et dans le centre.
Le reste du trajet est l’occasion d’aborder les sujets habituels comme la météo, le jardinage et les petits travaux dans la maison. Mais rapidement, alors que son père lui assure qu’ils n’ont pas attendu plus de 5 minutes devant la gare, Nicolas l’interroge sur les 45 minutes de retard du train.
Son père, apparemment résigné, répond qu’en gare de départ, il a semble-t-il fallu effectuer un “changement de matériel”, et “En plus, ils te préviennent à la dernière minute, comme si ce n’était pas prévisible ! Ah mais tu comprends ! Ce n’était pas comme ça avant, cette génération ne sait plus travailler !”
Nicolas sent ses sourcils se froncer. Il n’aime pas trop cette remarque, sentant que “cette génération” l’inclut certainement. Il a d’autant plus de mal qu’il n’a pas le privilège de travailler à la SNCF et ne bénéficie donc pas de leurs conditions très avantageuses de travail, ni même de celles de la fonction publique en général.
Heureusement, le trajet se termine, et Nicolas peut enfin respirer. Sa femme accueille avec un sourire chaleureux ses beaux-parents et son mari avec un regard compréhensif lorsqu’elle voit son air renfrogné marquant un léger agacement. Qui ne durera pas : le déjeuner est bientôt prêt, le poulet doré et on commence tranquillement par un apéritif détendu.
Joyeux, les parents de Nicolas détaillent les diverses journées “chargées” de leur retraite. Tai-Chi et activisme écologique pour Sylvie, qui adore s’allonger sur la route les lundi matins quand il ne fait pas trop froid avec les copines du groupe « Féminisons Le Vert ! » qui lutte contre l’automobile fasciste ; jardinage communal et randonnée verte pour Philippe, qui s’émerveille de tout le temps libre à sa disposition pour changer le monde.
D’ailleurs, la semaine dernière, ils ont même participé à une manifestation anti-Tesla avec les copains de son association de randonnée. Le visage de Philippe prend un air sérieux et il déclare avec gravité : “Ce Lon Musk est vraiment effrayant ! Tu as vu son salut nazi à la télé ? C’est quand même incroyable !”
Laura arque un sourcil perplexe : ne leur avaient-ils pas annoncé au téléphone il y a de cela quelques mois qu’ils s’étaient justement acheté une Tesla ? Nicolas est aussi confus et ne peut s’empêcher d’interroger son père :
“Mais, … mais tu ne viens pas d’acheter une Tesla ?
– Bien sûr, Nicolas ! C’était une bonne décision car il y a un bonus écologique jusqu’à six mille euros et une prime à la conversion, avec en plus exonération de la taxe sur la carte grise, et un coût d’entretien réduit ! Et puis, ça me changeait de la Nissan. »
Nicolas n’insiste pas plus ; ce n’est pas la première fois qu’il note des contradictions dans le comportement de son père. De toute façon, à ce moment-là, Léo déboule en trombe de l’étage où il s’occupait. Il adore passer du temps avec son grand-père et jouer avec ses maquettes lorsqu’ils viennent en week-end chez eux.
Philippe, ravi de revoir son petit-fils, le prend sur ses genoux : “C’est quand même bien de profiter des petits-enfants sans avoir les contraintes.”
Nicolas sourit. L’ironie de la situation ne lui échappe pas puisqu’il compte justement demander à ses parents de garder les deux rejetons pendant une semaine en automne, sa femme et lui ayant bien besoin de se retrouver. Cependant, lorsqu’il s’en ouvre, il reçoit une fin de non-recevoir : Sylvie lui explique qu’ils viennent tout juste de prendre leurs billets pour une éco-croisière en Mauritanie exactement à cette période :
“C’est ballot, tu devrais savoir que nous partons régulièrement à cette période-là, enfin, Nicolas !”
Intérieurement, Nicolas encaisse amèrement la nouvelle : c’est bien la quatrième fois qu’il demande à ses parents, en pure perte, de garder les enfants une petite semaine afin de pouvoir souffler. La dernière fois – lors du déménagement – n’avait pas non plus été possible : ce week-end là, Philippe avait justement un stage de salsa ! La fois précédente, Sylvie voulait se reposer et avait expliqué platement ne pas vouloir “subir la corvée de s’occuper des petits-enfants”. Petit à petit sa patience s’amenuise. Mais restons positif : nous n’en sommes après tout qu’à l’apéritif et le repas qui commence promet d’apaiser ces petites tensions.
Pour cela, Nicolas relate les péripéties de son achat immobilier, les visites multiples, les nombreuses déconvenues dues au DPE, au taux d’emprunt. Ce dernier fait réagir Philippe : “Tout de même, 3,4% pour le prêt, c’est une bonne affaire ! De notre temps, c’était facilement 9% !”
Nicolas manque de faire une fausse route avec ses légumes. Regardant son père avec un air mi-agacé, mi-consterné, il ne peut s’empêcher de remarquer tout haut qu’avec une inflation plus élevée et des salaires en hausse, les perspectives étaient franchement différentes…
Son père, reprenant avec entrain des petites patates sautées, enchaîne sans broncher : “Bien sûr, au lieu d’économiser pour avoir un bon apport, les jeunes préfèrent payer leur café 5€ dans un fast-food américain, manger des avocats sur toast ou s’acheter le téléphone dernier cri. Avant c’était un téléphone pour toute la famille et les poules étaient bien gardées !”
Décidément, Nicolas constate bien que son père est bourré de clichés sur sa génération. La moutarde lui monte doucement au nez mais Laura lui lance un regard apaisant. Elle n’en pense pas moins mais préfère calmer le jeu : après tout, les personnes âgées sont rarement réalistes sur les soucis de la nouvelle génération.
Malheureusement, la salve suivante de Philippe, verre de rouge à la main, n’améliore pas la situation, puisqu’il ajoute : “Et puis, on n’a pas passé notre vie à trimer pour continuer à se défoncer après 60 ans ! C’est grâce à notre travail et nos négociations, parfois à la dure, que vous avez tous ces avantages aujourd’hui hein !”
Nicolas pose sa fourchette sur la table et avale prudemment sa bouchée. Il ne veut pas tousser pour ce qu’il a à dire. Regardant son père droit dans les yeux, il sort d’un trait : “Avantages ? Mais de quoi tu parles ? Notre salaire est amputé de moitié pour payer votre retraite et une sécurité sociale toute pourrie ! Notre retraite, on n’y aura pas droit sans la bâtir nous même, j’ai même fait le calcul ! On paye des impôts et des taxes de tous les côtés, et en face on a des services de plus en plus pourris et une administration qui nous crache à la figure. Mes gamins se font bourrer le mou avec une écologie de plus en plus délirante qui les rend anxieux et qui va m’obliger à changer de voiture, et va rendre la barraque impossible à louer dans 3 ans. En plus, quand tu avais 35 ans, ton job ne risquait pas de se faire remplacer par l’IA ou par le premier bénéficiaire de quota ou celui qui permettra à la boîte de toucher les meilleures subventions ! Et quand tu sortais du cinéma, tu ne risquais pas de te prendre un coup de couteau par un malade mental ou par un terroriste auquel tu aurais refusé une cigarette… Oh et puis ça va, la génération du Baby Boom. Vous avez bien profité des 30 Glorieuses, et vous avez voté pour toutes les politiques qui ont favorisé une retraite payée par la génération suivante, et une dette monstrueuse ! Depuis quand demande-t-on aux enfants de payer pour les parents hein ? Toi, tu es parti à la retraite à 60 ans ! Moi je vais devoir trimer jusqu’à 68 ans et encore, ça, c’est probablement le meilleur des cas ! Vous êtes bien gonflés de râler dès qu’on vous demande un service alors que vous êtes complètement dépendant des autres dès qu’il s’agit de toucher votre pension ! L’essor de la France c’était les années 80-90 mais clairement pas aujourd’hui. Donc tes réflexions tu peux te les garder pour toi !”
Pendant toute la tirade, Philippe est resté coi, éberlué. Il n’avait pas vu venir cet accès soudain de colère. Brusquement, Nicolas se lève de la table et jette sa serviette.
“Allez on remballe. Je vous ramène à votre hôtel pour que vous soyez tranquille, puisque voir vos enfants et petits enfants est ‘trop contraignant’. Prenez vos affaires.”
L’assemblée ébahie met un certain temps à réagir. Laura, les yeux écarquillés et agréablement surprise par la réaction de son mari, esquisse un petit sourire en coin ; elle le remerciera de cette tirade plus tard dans leur intimité. Cependant, Philippe sort de sa transe et toussote : “Oui heu bon… Ça va quand même, pas la peine d’en faire des caisses non plus… C’est pas trop mal aujourd’hui pour vous j’espère… Tu as une belle maison non ? Allez Nicolas… Sois pas mauvais bougre.”
Nicolas pousse un gros soupir et semble se calmer. Son père n’est pas méchant mais il ne réfléchit pas toujours à ce qu’il dit. Parfois, il faut dire les termes et parler vrai. Regardant le repas à moitié fini, la figure contrite de son père et sa mère qui semble intensément regarder les restes de son poulet dans son assiette, Nicolas se rassoit.
Et alors qu’il se demande si sa réaction ne fut pas un peu trop vive, Sylvie finit par admettre : “Nicolas, si tu veux, on va se réorganiser pour vos vacances à Laure et toi. Nous pourrons garder les enfants.”
Quand la réalité les rattrape…
«Il faut être réaliste» : le gouverneur de Californie fait volte-face sur la couverture santé des sans-papiers
lefigaro.fr/conjoncture/il-faut-etre-realiste-le-gouverneur-de-californie-fait-volte-face-sur-la-couverture-sante-des-sans-papiers-20250515
Et c’est la faute de…
J’attends fébrilement de connaître les parents de Laura (le beau-Papa et la belle-Maman de ce pôooovre Nicolas). Je sens qu’on va encore se régaler…
Hoho ho ho!
Je me marre.
Je vais la montrer a ma fille celle la.
x.com/i/status/1923699988049072173
Bon c’est un tantinet malhonnete parce que je crois que n’importe quel bout de peau humaine montrera a peu pres la meme chose, mais bon.
Sauf que « ce » sera de votre « propre » peau humaine (bien de chez vous), et pas « d’ailleurs donnezaitoukikoi », mais bon, comme vous dites.
Le Japon, c’est un pays fantastique pour voyager. Mais pour y vivre, c’est mortifiant. Même en y ayant habité 20 ans, même en maitrisant parfaitement la langue, les us et coutumes, même complètement tatamisé, on sera toujours traité comme un étranger. J’ai bien dit : toujours.
Ce qui est logique.
Gaijin un jour, gaijin toujours …
« Même en y ayant habité 20 ans, même en maitrisant parfaitement la langue, les us et coutumes, même complètement tatamisé, on sera toujours traité comme un étranger. J’ai bien dit : toujours. »
Je ne vois pas où est le problème.
ll faut se représenter quel effet ça fait d’être traité comme un étranger, presque comme un outcast même par ceux que tu considères comme des amis. A moins d’être un asocial qui n’a aucun sentiment d’appartenance, aucune notion ni d’amitié ni de reconnaissance sociale, cela finit par être particulièrement mortifiant pour un occidental.
S’entendre dire « oh vous parlez bien japonais » par son chef avec qui tu as bossé pendant des années est une subtile, mais retorse façon de te rappeler tes origines étrangères, et te faire sentir que tu ne fais pas, et ne fera jamais partie de l’équipe à part entière. Quant tu as fais les nécessaires efforts d’apprentissage, d’adaptation et d’intégration, oui, c’est difficile à encaisser.
Je ne suis allé au Japon que pour le travail et de courts séjours.
En revanche j’ai vécu à l’étranger (Afrique et Moyen-Orient), pas pendant 20 ans mais plusieurs années tout de même.
Il ne me serait jamais venu à l’esprit de me considérer comme un local.
Un étranger reste un étranger, apprendre la langue, respecter les usages et même épouser une locale et avoir des enfants avec elle ne fera pas d’un étranger un local (même s’il finit par obtenir la citoyenneté).
« oh vous parlez bien japonais » peut être vu comme de la reconnaissance ou une façon de vous renvoyer à vos origines.
C’est à vous de voir mais vous prendre pour un japonais sous pretexte que vous parlez la langue et êtes sur place depuis 20 ans me parait étrange.
Il ne s’agit pas de ça, évidemment on ne peut pas devenir ethniquement japonais, merci de ne pas m’attribuer ce genre d’idiotie… 🙄
Mais on peut devenir pleinement italien, américain, anglais ou même gabonais quand on y a fait sa vie, qu’on s’est intégré, et que ce pays qui n’est pas ton pays d’origine est devenu ton pays, on y est chez soi et on y est traité comme tout le monde. Quantité d’africains, de maghrébins, d’asiatiques se sont intégrés en France et sont devenus français. Il ne me viendrait jamais à l’idée de leur dire « oh tu connais cette expression en français ? » ou bien de feindre la surprise en remarquant « ah tiens tu manges du gratin dauphinois?? » alors que je sais qu’ils ont fait leur vie ici, qu’ils y vivent depuis des dizaines d’années.
Au Japon, on te fera toujours sentir que tu n’es pas intégré, que tu ne fais pas partie du pays, du quartier, de l’équipe et même de la famille si tu y as épousé ta femme. Se sentir mis à part, rejeté par ceux-là même que tu as mis dans ta vie est socialement mortifiant.
Si tu ne comprends pas l’idée alors je ne peux rien pour toi, désolé.
Je me suis bien gardé de parler d’ethnie mais il est évident qu’avoir un physique différent de la population locale enverra toujours le message « étranger » même pour les enfants métis nés sur place et n’ayant jamais vécu ailleurs.
« Mais on peut devenir pleinement italien, américain, anglais ou même gabonais quand on y a fait sa vie, qu’on s’est intégré, et que ce pays qui n’est pas ton pays d’origine est devenu ton pays, on y est chez soi et on y est traité comme tout le monde. »
C’est certainement plus facile de s’intégrer dans un pays culturellement proche comme l’Italie car en maîtrisant la langue et les usages seul le nom de famille et éventuellement le prénom (qui peut être adapté, Joseph peut devenir Guiseppe) peuvent réveler les origines étrangères.
Néanmoins un français ayant fait sa vie en Italie restera tout de même un français.
Le Japon est un pays où le racisme est très présent même envers les asiatiques non japonais. C’est le seul pays où je n’ai pas pu accéder à certains établissements publics (bars, restaurants) parce qu’il était évident que j’étais un étranger.
Ce n’est pas agréable à vivre mais le visiteur c’était moi alors c’était a moi de faire avec.
Les étrangers qui ne supportent pas d’être mis à part devraient peut être choisir un autre pays pour s’expatrier.
Détail supplémentaire, quand tu travaille à l’étranger en tant qu’expat’ par exemple, tu sais que tu y es pour quelques années, tu n’as pas l’intention d’y rester et tous ceux que tu côtoient sur place le savent, dans ce cas-là le problème ne se pose pas, évidemment. Ca n’a rien à voir si tu as décidé d’y faire ta vie.
« Ca n’a rien à voir si tu as décidé d’y faire ta vie. »
Entièrement d’accord mais c’est toi qui va t’installer chez eux.
Si tu ne supporte pas leur mentalité ce n’est pas à eux de s’adapter mais à toi de retourner chez toi ou de choisir un autre pays.
Cette mentalité japonaise (facho , n’ayons pas peur des mots) est il vrai bien connue. Il est étonnant que Slump s’en étonne. Le principal c’est que ce soit pas de mauvais bougres. En Syrie, tu traverses le pays à pied, on te jette des cailloux, c’est à un autre niveau.
linformateurdebourgogne.com/route-de-cluny-coup-de-vent-force-3-sur-les-radars/
Méfiez vous des radars en cas de fort coup e vent… 😀