Last action zero

Au fin fond de l’univers, à des années et des années lumières de la Raison, veille celui que le gouvernement super-sidérant appelle quand il n’est plus capable de trouver un problème à ses solutions, quand il reste trop d’espoir : le Capitaine Blâme.

Le Capitaine Blâme, de son vrai nom Jean Lassalle, est le grand anti-héros de l’Assemblée Nationale : il a le super-pouvoir de transformer une situation simple, qui ne réclame aucune intervention d’aucune sorte et qui satisfait tout le monde, en situation inextricable, coûteuse, pénible et finalement problématique pour tous.

Sa dernière mission est un succès total. En voici un résumé que j’espère fidèle.

Tout a commencé il n’y a de cela pas si longtemps, dans une galaxie très très proche, lorsque la société Toyal, firme japonaise spécialisée dans le traitement des poudres d’aluminium et installée dans la vallée d’Aspe, décida qu’il fallait moderniser son activité.

Pour des raisons économiques et des raisons écologiques, l’entreprise étant classée Seveso 2 et encaissée dans la vallée, Toyal s’était décidé à effectuer une extension de son site en ajoutant ses nouvelles activités sur Lacq, situé à des années lumières 60 kilomètres de là.

Ainsi, les écolos de la région y trouvaient leur compte, l’entreprise aussi, et finalement, tout le monde était content.

C’en était trop pour le Capitaine Blâme. Un mal de crâne épouvantable s’empara de lui. Bandant tous ses muscles, verrouillant son regard d’acier sur le dossier Toyal et crispant sa mâchoire dans la position du Boa Repu, il décida en un éclair qu’il fallait agir.

Son mode d’action fut sans pitié, ni pour lui-même, ni pour les média, ces amis des faibles, des opprimés et des crétins thermophiles. Le super-pouvoir de Capitaine Blâme consistait pour l’occasion à se passer de nourriture et maigrir jusqu’à ce que, au mieux, la mort survienne ou, au pire, le gouvernement trouve une solution pour contraindre Toyal à ne pas réaliser son extension.

En effet, le Capitaine Blâme ne propose rien lui-même, et ne dispose d’ailleurs en lui-même d’aucun autre pouvoir que celui de ne pas reprendre deux fois des nouilles : il lui faut absolument l’intervention extérieure du gouvernement pour arriver à ses fins ; sans l’Etat, point de salut, ou plutôt, dans ce cas, aucun Merdage Grand Angle possible.

Ainsi fut fait, dans la plus parfaite exposition médiatique rigoureusement indispensable pour obtenir gain de cause. Et ainsi fut obtenu : le gouvernement, ne sachant probablement pas du tout comment évacuer discrètement un cadavre de député tout sec et tout maigre du palais Bourbon, plia (sans doute plus devant les média que devant l’hypothèse de la perte de ce député).

Il fut donc décidé que Toyal resterait en place, sans s’étendre, et que les surcoûts générés par ces changement d’orientation imposés seraient absorbés par l’Etat… c’est-à-dire tous les contribuables.

Capitaine Blâme avait gagné.

Mais c’était sans compter sans le deuxième effet Blâme : le premier permet de créer le problème, le second le rend inextricable.

Car au bout de quelques mois, que vit-on ? L’Etat, déjà suffisamment empêtré dans une dette colossale, ne paya point (ce qui ne surprendra personne), et Toyal rouspéta : « l’Etat ne tient pas les engagements qu’il avait pris dans cet accord que, déjà, on nous avait imposé. Avec cet accord, on perd de l’argent et, en plus, nous venons d’apprendre, il y a trois jours, que l’Etat veut nous faire payer 450.000 € pour la plate-forme qu’il est indispensable de construire si on veut nous obliger à maintenir dans la vallée les nouvelles fabrications que nous voulions implanter, pas loin d’ici, à Lacq. »

Le Capitaine Blâme est très fort. Car à présent, Toyal, têtu, se tâte et tergiverse : s’il reste, il paye plus cher pour une installation qu’il aurait pu avoir à Lacq et qui contentait tout le monde ; de surcroît, il fait payer tout le monde (le contribuable), et fait courir un risque supplémentaire et écologique à la vallée d’Aspe. Le coût d’un départ et d’une délocalisation franche en Roumanie dans une autre galaxie devient rentable devant le monceau d’enquiquinements administratifs, financiers, médiatiques, salariaux et Blâmesques créé depuis l’intervention du piteux ‘Pitaine.

Eh oui :

  • Si Toyal reste, les écolos ne seront pas contents ; l’Etat devra payer des paquets d’argent qu’il n’aurait jamais eu à payer si le Capitaine Blâme n’était pas intervenu. Toyal est perdant, l’Etat est perdant, les écolos sont perdants et le contribuable est perdant.
  • Si Toyal part, la vallée verra son chômage augmenter. Toyal perdra une entreprise implantée depuis 80 ans sur place. Les employés seront perdants. L’Etat perdra en taxes et en cotisations. Le contribuable sera perdant là encore.

Encore une mission extraordinairement foirée par le Capitaine Blâme qui aura permis de transformer une situation où, au départ, Toyal se débrouillait très bien tout seul et où tout le monde pouvait y trouver son compte en situation où tout le monde perd, et, encore plus ahurissant, Lassalle lui-même…

On se demande, exactement ce qui a poussé le bouillant député extrême-centriste à agir au premier chef ? Si, d’une part, la médiatisation gluante qui accompagna la grève d’estomac n’avait pas eu lieu, et si, d’autre part, le gouvernement, dès lors détaché de la pression des journalistes en recherche de sensationnel, n’avait pas sottement acquiescé aux sottises de l’impétrant, tout ceci serait resté au rang d’une bonne blague, d’un canulard de député un peu original.

Mais là encore, l’affaire semble démontrer s’il était encore besoin l’impérieuse nécessité pour les hommes politiques de faire parler d’eux pour le plaisir, la compulsion navrante de ces mêmes politiques à réagir systématiquement à chaud, sans se servir le moins du monde d’un peu de recul ou de simple bon sens, et la nature délétère du lobbying installé dans ce pays comme véritable institution, point de passage obligé de groupuscules obscurs pour favoriser leurs intérêts personnels au mépris le plus total de cette démocratie dont les politiques, justement, se gargarisent à longueur de plateau télé.

Edifiant. On attendra avec impatience gourmande la prochaine saillie de Capitaine Blâme. Une bonne tranche de rigolade (à nos frais) en perspective…

NouvelObs
Les Echos

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Commentaires10

  1. JiCé

    Personnellement, je n’ai jamais compris le pourquoi de l’action de Lassalle.
    Agir de cette façon, c’est ouvrir la boîte de Pandore.

  2. Bob

    @JiCé:

    1.par vanité, pour exercer son pouvoir.

    2.par vanité, pour etre vu a la télé.

    3.par vanité, pour etre confondu avec un héros.

  3. Chris

    Savoureux, comme d’hab. Mais là particulièrement. Bravo.

    Lassale ? C’est un con. Voilà.

    Mais je suis d’accord avec le Pingouin : Ségolène, si élue, fera beaucoup plus fort que le Capitaine Blâme. Elle sera Généralissime Blême.

  4. Jesrad

    "Au fin fond de l’univers, à des années et des années lumières de la Raison, veille celui que le gouvernement super-sidérant appelle quand il n’est plus capable de trouver un problème à ses solutions, quand il reste trop d’espoir : le Capitaine Blâme."

    Mais où va-t’il chercher tout ça ?!

    (Ah oui, bien sûr: Eris parle à tout le monde, il suffit de l’écouter 😉 )

  5. cala

    du 23 01 07 au 21 01 08: 1 an de passé et …capitaine blâme est au plus haut dans le coeur des ours…de notre si belle vallée. Faut-il huer le peuple et villipender la démocratie?

  6. Azalee

    Quel chemin depuis 7 (9) commentaires par chronique! ☺
    Mes sincères et humbles félicitations.
    Merci à vous.

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