J’ai évoqué, subtilement, l’érythème fessier dans un précédent billet. Une des façons d’en choper un beau consiste à mariner dans le caca. Or, c’est précisément ce que semble faire certain chef d’état dans les grosses commissions d’une certaine affaire, d’état elle aussi, impliquant des sous-marins, des explosifs, des tués et des pays lointains…
Eh oui : toutes les semaines, l’affaire Karachi se rapproche de Nicolas Sarkozy. On se souvient qu’il y a tout juste un mois, j’évoquais les blocages complets rencontrés par le rapporteur de la Commission d’enquête parlementaire à ce sujet.
En ce début de mois de juin, paf, on remet le couvert. Et cette fois-ci, le boulet n’a pas été tiré du Bisounoursland, où la bisouconomie nécessite que les affaires d’état, qui impliquent beaucoup d’argent, beaucoup de beau linge et beaucoup d’entreprises nationales, ne soient pas résolues.
C’est du Luxembourg que nous viennent les nouvelles effluves de cette putride histoire.
Et cette fois-ci, on sent qu’il sera plus difficile de nier toute implication de Nicolas Sarkozy dans l’affaire puisque son nom est explicitement et directement mentionné dans un rapport de police luxembourgeois. Il semble que Mediapart fasse avancer le schmilblick en révélant cet élément que le reste de la presse française traditionnelle s’est contenté de relayer.
Au passage, il est d’ailleurs tout à fait éclairant de constater que le nombre de scandales d’états révélés ces dernières années par la presse sur-subventionnée s’amenuise drastiquement à mesure que l’argent public vient perfuser ces organes. Et il est aussi très intéressant de noter que le Karachigate est notoirement plus traité sur l’internet que dans la presse mainstream. Probablement pour la même raison.
L’information essentielle est donc que Nicolas Sarkozy aurait validé la création d’une société off-shore destinée à financer la campagne électorale de Balladur, en 1995. Selon cette thèse, ce sont ces financements occultes, en provenance du Pakistan auquel se négociait la vente de sous-marins, qui sont à l’origine du différend entre les Pakistanais et les Français, différend qui entraîna la mort de 14 personnes en 2002.
(Suppositoire nucléaire pour Sarkozy, version petit modèle)
Evidemment, la garde rapprochée du président est montée au créneau pour balayer ces affirmations d’un « Oooh pffouu allons allons, pfuu vous n’y pensez pas ooh vraiment pffu » parfaitement crédible. Insultant sans vergogne les familles des victimes, Chatel a ainsi affublé l’ensemble de la révélation de l’expression péjorative « fable à épisodes« , enchaînant sur un mensonge patent :
« La justice suit son cours, à chaque qu’il y a eu des demandes de la part du juge de lever le secret-défense, le secret-défense a été levé. »
Comme on s’en souvient (et comme noté plus haut), le rapporteur de la Commission d’enquête se plaignait précisément de la non-levée du secret-défense. Mieux : la commission consultative qui décide ou non de cette levée ne rendra sa décision que le 15 juin prochain.
Sacré Chatel.
En réalité, ce qui me chatouille désagréablement le bon sens, ici, n’est pas que Sarkozy serait ou pas mêlé pour de bon à cette sombre histoire. Il l’est, par action ou par omission, quasiment volens nolens, parce que sur la période en question, il a du être responsable direct ou indirect des transactions qui émaillaient le marché correspondant.
Ce n’est pas ça, en réalité, qui m’agace, non. Ce sont les réactions de ses affidés : complètement à côté de la plaque, jouant sur le mode outré d’une tentative de ridiculiser les affirmations de plus en plus étayées qui sont présentées régulièrement.
Les élites gouvernementales et présidentielles continuent en fait de se moquer ouvertement de notre tête.
On savait qu’ils se foutaient comme de l’an 40 de l’avis des Français en ce qui concerne l’Europe. On savait qu’ils les prennent pour des gamins incapables d’encaisser la réalité sur l’état catastrophique des finances. On soupçonnait qu’ils n’étaient, finalement, que des gamins insouciants, heureux mais totalement irresponsables, dès lors qu’il s’agit de gouverner, de diriger et de claquer les thunes des autres pour leurs propres lubies.
Mais on apprend qu’en plus de ça, ils n’ont pas la plus élémentaire décence, la plus stricte politesse qui consiste, devant les révélations qui s’accumulent et le scandale qui gonfle, à se taire et attendre calmement que les commissions d’enquêtes rendent leur rapport.
A tout le moins, on aimerait bien que les bouffons ou les incompétents qui parlent de fable arrêtent.
Soit ils savent pertinemment le fin fond de l’affaire et balancer ce genre de remarques n’est en rien digne de leur fonction. Un peu de prestance, merde. Je sais que le courage a totalement disparu de tous les politiciens de ce pays, mais au moins, tenez-vous droit dans votre pantalon quand vous vous pissez dessus !
Soit ils n’en savent rien, et déclarer alors qu’il s’agit d’un pipeau orchestral est une marque d’incroyable arrogance, un véritable camouflet aux gens qui auraient les compétences d’occuper leurs places et de se garder, dans les circonstances, de toute déclaration à l’emporte-pièce.
Ces pitres vous gouvernent. Ils dilapident votre argent. Ils vous méprisent. A présent, ils vous insultent.
Et vous continuez à voter ?
La prévarication et la corruption resteront la marque de fabrique de ce régime agonisant. Qu’on nous ne dise pas qu’il n’y a pas eu d’enrichissement personnel, les différentes fonctions électives (surtout leur cumul)y suffisent amplement. Bientôt, un CV politique digne de ce nom devra mentionner, en plus de celui de la promotion de l’ENA (je verrai bien comme prochain nom Mandrin ou Cartouche), les différentes mises en examen, suspicion ou scandale, voire condamnation sans laquelle il n’y a pas de belle carrière. Nos fermiers généraux sont de plus en plus enfermés dans leur tour d’ivoire. Pas de dessein ou de projet, l’important est de connaître celui ou celle qui décrochera la timbale (oserons-nous employer le terme de pot de chambre?) dans deux ans. Plus rien d’autre n’a gré à leurs yeux.
CPEF
Toi, le pourfendeur de bisounours land qui te votre dans le cliché « tous pourris » cessons de voter ! H16 enfin…
Tu découvres vraiment que les gros contrats militaires et économiques (énergies etc…) font l’objet de contre-parties dégueulasses ? de soutiens en tous genres ? de commissions et de rétro commissions ? Tu t’étonnes encore de cela après les « scandales » qui ont touché a peu près tout ce que la France a eu de dirigeant dans son histoire républicaine… et plus encore ?
Mais la France n’est même pas une exception et le seul levier qui demeure est précisément le vote. C’est faible, d’une utopie sans noms mais c’est la seule option…. Ou la révolution ? Je ne te connaissais pas si vigoureux 🙂
A+ !
Tu n’as pas lu mon billet ? Il n’est pas sur la corruption des zélites, qui est une évidence scandaleuse (tant parce qu’elle existe que parce qu’elle est devenue habituelle). Il est sur le ton employé par les affidés du Président qui balancent de la fable à tour de bras ; c’est un peu différent.
Il me semble que la dernière fois qu’on a voté pour un truc sérieux, ils n’en ont rien eu à faire.
Donc le vote, comment te dire…
C’est faible, d’une utopie sans noms mais c’est la seule option…. Ou la révolution ?
Il me semble que H16 a répondu d’un mot, il y a peu de temps: « Achetez de l’or . . . ou du pomb ». Rien à redire.
J’espère qu’il est bien clair dans l’esprit de tout le monde qu’il ne faut plus donner un centime à la presse.
tiens maintenant que tu le dis ca fait au moins huit ans que je n’ai pas achete de canard papier…
On me le reprochera, mais cette affaire m’en rappelle une autre, encore plus nauséabonde d’ailleurs….
Et à ce moment là, tous les politocards (ou presque), les artistes, et autres soixante-huitards bourrés de bonnes intentions et de nostalgie ont réussi à couvrir l’immonde fosse à purin qui avait été mise à jour.
Quand la fosse fut couverte, l’ami Sarkoco a remercié son équipe du soutien témoigné en leur rappelant qu’une telle mise au pilori aurait pu arriver à chacun d’eux.
Ces gens ne savent pas forcément de quoi il retourne. Ils savent seulement ce qui peut leur arriver si leurs propres petits secrets étaient révélés, et ça leur suffit.
Tous pourris, tous solidaires.
H16 tu n’as pas le droit de parler de la sorte concernant une affaire dont l’enquête n’est pas encore finie et sur laquelle tu filtres des informations qui mettent des fonctionnaires en danger. Cette enquête, on sait pertinemment qu’elle consiste à dézinguer la Droite, pourtant la seule à pouvoir sortir le pays de l’ornière. Les juges sont de gauche, il n’y a pas de doute, j’attends qu’ils fassent la même chose concernant les Aubry et les DSK et on en reparlera, à qui profite le crime? En tout cas, les mecs de l’UMP ont raison de réagir de la sorte, c’est vraiment dégueulasse d’accuser de manière voilée Sarko de crimes. Et comme par hasard, la presse en fait ses choux gras, on sait pour qui ils votent ceux-là. En démocratie, il y a des choses à respecter sinon c’est le bordel, un président ne peut être attaqué en justice, et tant mieux, on ne peut pas attaquer la tête du pouvoir tous les 4 matins pour ses intérêts personnels au-dessus des intérêts du pays.
Bon Ok jdéconnais, c’est bon j’ai réussi mon imitation de Maurice B?
Très crédible 🙂 d’ailleurs je me demande où il a atterri, ça fait un moment qu’on ne le voit plus guère.
Il sévit chez Vincent Bénard. Qu’il est pénible Momob, qu’il est pénible!
Oui il faut voter, mais pour virer ces cliques d’enarques prevaricateurs.
Il y a assez de choix aux elections au premier tour pour se debarasser pour de bon de ces aigrefins.
Du choix entre le SIDA (socialisme Initiateur d’une décadence avancée) de droite et celui gauche ?
Que nos élites soient corrompues, je n’en disconviens pas mais j’ai quelques doutes sur le Karachigate. Tout d’abord les commissions sont autorisées pour l’armement (on peut donc toujours fantasmer des rétro-commissions) et ce rebondissement avec l’affaire luxembourgeoise je ne vois pas le rapport et on ne m’a pas expliqué ce que cherche le Luxembourg (le Karachigate ils s’en battent).
Toute cette affaire me fait penser à un bon « story telling », il n’y a rien de concret et le secret défense permet d’accrédité tout cela.
Le problème avec cette histoire c’est que personne ne sait rien et tout le monde parle aussi bien à charge qu’a décharge.
Ce sont donc plus les médias qui sont responsables et incompétent que les politiques, ne sachant rien (si mon hypothèse qu’il n’y a rien mais que c’est difficile à prouver, est vraie), parlent me paraît aller dans l’ordre des choses (même si je le regrette).
Je m’étais abonné à Mediapart pour soutenir la création d’un nouveau journal.
Je m’étais désabonné de Mediapart à cause d’une ligne éditoriale dont l’anti-libéralisme était grotesque.
J’envisage de me réabonner à Mediapart, qui paraît être le seul journal à encore en avoir dans ce pays.
Visiblement, Junker n’a pas supporté d’être écarté au profit de Van Rompuy.
Et le Luxembourg d’avoir été pris pour l’Ile de la Tortue du monde bancaire.
PS : l’industrie d’armement est à peu près la seule qui tienne encore la route en France. Peut-être parce que dans ce domaine, le mieux disant financier n’est presque jamais celui qui remporte le contrat.
Attentat de Karachi : François Léotard a signé le contrat de vente de trois sous-marins au Pakistan le 21 septembre 1994. A l’époque, il était ministre de la Défense.
Le 24 novembre 2009, devant la commission d’enquête parlementaire, François Léotard a donné des noms : il a balancé Renaud Donnedieu de Vabres et Hervé Morin.
Lisez cet article :
L’ancien ministre a toutefois minimisé sa connaissance du dossier, assurant que « c’étaient principalement les membres de son cabinet qui recevaient les négociateurs » et citant à ce propos ses directeurs de cabinet (civil et militaire) d’alors, son conseiller spécial Renaud Donnedieu de Vabres et… l’actuel ministre de la Défense Hervé Morin, qui n’était pourtant qu’un simple collaborateur.
http://www.lepoint.fr/actualites-politique/2010-06-08/info-lepoint-fr-karachi-leotard-croit-a-une-vengeance-liee-aux-commissions/917/0/464301
En 2009, Hervé Morin n’a pas donné au juge tous les documents classés secret-défense que le juge lui demandait. On comprend pourquoi.
L’actuel ministre de la Défense Hervé Morin faisait partie du clan Balladur-Sarkozy à l’époque (1993-1995).
Le clan Balladur-Sarkozy (1993-1995) :
– le Premier ministre Edouard Balladur,
– son directeur de cabinet : Nicolas Bazire,
– le ministre du Budget Nicolas Sarkozy,
– le directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy : Brice Hortefeux,
– le ministre de l’Intérieur Charles Pasqua,
– le ministre de la Défense François Léotard,
– le directeur de cabinet de François Léotard : Renaud Donnedieu de Vabres,
– le conseiller de François Léotard : Hervé Morin.