Un peu d’éco en attendant la catastrophe

Depuis trois ans, le débat est vif pour déterminer qui, de la déflation ou de l’inflation, va l’emporter. À mesure que les nouvelles économiques s’accumulent, il reste difficile de dégager une tendance. Cependant, avec la montée progressive mais constante des prix des métaux précieux, et, plus visiblement, du prix des matières premières et de la nourriture, il semble que la tendance soit, belle et bien, à l’inflation. Et comme nous allons l’aborder ici, cela va bien au-delà de la piécette et de la boîte de haricots…

Pour ce qui est de l’inflation, même le petit Jean-Claude, directeur de l’Imprimerie Européenne d’Argent Gratuit, fait le constat qu’elle ne diminue pas des masses et qu’elle se porte même de mieux en mieux.

Ce constat d’inflation est prudemment basé sur l’augmentation récente des prix des matières premières et, surtout, de l’énergie ; avec un baril à plus de 100$, on peut en effet difficilement dire que tout est parfaitement contenu. A la suite de cette constatation – somme toute prudente – le brave Trichet embraye cependant sur la partie prévisions à moyen terme et nous ressort le petit fifrelin habituel :

“Mais cela ne modifie pas, pour le moment, notre diagnostic selon lequel l’évolution des prix restera compatible avec la stabilité des prix à l’horizon pertinent pour la politique monétaire”

Oui, tout augmente, ma bonne dame, mais les prix restent stable. C’est aussi ça, la nouvelle économie : ça reste stable tout en montant. Magique et rigolo, on dirait du cabaret. L’avantage, quand on s’exprime pour la ménagère moyenne, c’est qu’elle n’est pas censée fricoter avec les sites financiers qui, eux, apportent une tonalité différente à la “stabilité” que Jean-Claude nous vend avec ses barils de billets fraîchement imprimés.

On découvre ainsi qu’en réalité, tout flambe. Par exemple, le coton : 17% d’augmentations, en 1 mois. Ici, le coup du “c’est parce qu’ils veulent tous manger comme nous” (du coton, hein) paraît un peu … à côté de la balle (de coton). Et on imagine mal les Chinois ou les Indiens se ruer sur les chemises en soldes de Janvier au point d’entraîner 17% de hausse. Qu’il y ait ou pas pénurie, différentiel offre/demande défavorable, ou ruée sur les chemises cintrées, de toute façon, peu importe : les prix augmentent dans des proportions qui laissent songeur. Les quantités d’argent injectées dans le système pendant les trois années précédentes finiraient-elles par infuser le reste de l’économie ? Hypothèse peut-être hardie, mais qu’on est en droit de formuler…

Tellement hardie que cette augmentation est maintenant planifiée : évidemment, les mouches du coche gouvernemental, usant de leur malheureux droit de parole à tort et à travers, nous font savoir en vibrant d’excitation qu’ils feront tout pour sanctionner les futurs abus dans ces hausses de prix qu’on imagine déjà cinglantes. On se demande ce qu’ils pourront bien faire, très concrètement ; une bonne diminution de prix provoquée par la disparition de la PAC, par exemple, ne sera jamais à l’ordre du jour. On se rappelle de la grogne des producteurs de lait lorsque ce dernier voyait ses prix … baisser.

Le seul marché où, finalement, tout le monde, jusqu’à récemment, affichait un sourire pepsodent lorsque les prix grimpaient à des niveaux obscènes était celui de l’immobilier. Il n’y a que depuis quelques mois qu’on sent les fronts se plisser sur les augustes figures gouvernementales.

Eh oui : à force de voltiger à des niveaux si élevés que le ridicule le dispute au malsain, même les politiciens les plus abrutis par leur propre propagande ont fini par se rendre compte que l’immobilier devenait inabordable dans les grandes villes au point de pousser toujours plus de monde dans des situations ubuesques.

Les récents dossiers de différentes origines (décortiqué par Vincent Bénard, celui de l’OCDE, et celui de la Fondation Abbé Pierre) brossent pourtant un tableau assez clair de la situation : plus l’État s’agite pour aider les pauvres à accéder à la propriété, plus ces derniers en sont exclus, et, pire, plus les loyers grimpent.

L’étude de l’OCDE note ainsi discrètement que, je cite :

La France figure parmi un groupe de neuf pays de l’OCDE où les hausses des prix réels des logements ont été de modérées à importantes – de 20 % à 90 % — sur la période 1980 à 2008. La volatilité des prix en France est imputable en partie à l’offre limitée de nouveaux logements, qui réagit très peu à l’augmentation de la demande, notamment par rapport aux pays nordiques ou au Canada et aux États-Unis. La France pourrait améliorer la réactivité de l’offre en rationalisant les procédures complexes de demande de permis de construire et en améliorant les règles en matière d’utilisation des sols.

Rappelons que seul l’état (au travers des mairies, notamment) décide où l’on peut construire, et comment. Sympathique privilège qui entraîne immanquablement de la corruption et une dilution de la responsabilité individuelle, avec des conséquences palpables dont, par exemple, les noyés de la Faute-Sur-Mer se souviennent.

En parallèle à ces procédures complexes, si l’on ajoute les coûts de transactions les plus hauts d’Europe après la Belgique, plus l’ensemble de toutes les contraintes administratives qui pèsent maintenant sur la construction neuve ou la mise à la norme de la construction ancienne — contraintes qui ne font en rien baisser l’addition de personne, doit-on le rappeler — on comprendra que devenir propriétaire en France devient réservé à ceux qui sont dans l’étroit sentier du salariat, fonctionnaires ou dans une grande entreprise, relativement à l’abri des bourrasques fâcheuses de la crise économique.

Fort de ce constat, on peut mener une analyse assez juste tout en proposant des solutions qui empireront encore la situation (comme la réquisition des logements vacants), ou se rapporter aux préconisations de ceux qui travaillent pour l’État, par l’État et en l’État.

Ils proposent, eux, de s’agiter plus fort encore, en ajoutant l’insulte à l’injure : les prêts à taux zéro sont une réussite pour les classes moyennes qui peuvent acheter et ne servent en rien pour les classes les plus modestes ? Remettons-en une bonne couche !!

PTZ+ , la soluce !

Bilan des courses ? Zut de zut, le prix du m² continue de grimper. Si l’on y factorise ce que j’expliquais dans les premiers paragraphes, à savoir l’inflation, on se rend compte que les crédits immobiliers sont de plus en plus cher, et que la situation immobilière montre absolument tous les signes d’une bulle :

  1. “Cette fois, c’est différent” : on trouve des explications en long, en large et en travers pour justifier que les autres fois, c’étaient des bulles, et que maintenant, c’est juste pas tout à fait la même chose, c’est différent, ça va durer.
  2. Il n’y a que d’excellentes raisons pour lesquelles les prix montent, et aucune mauvaise. Ayez confiance.
  3. L’état est impliqué dans la magouille, de bout en bout.
  4. Tout le monde investit, y compris le proverbial cireur de chaussures de Rockfeller.

En réalité, tous ceux qui ont deux sous de bon sens et qui auront la présence d’esprit de regarder ce qui s’est passé ailleurs, et ce qui se déroule actuellement sous nos yeux, tireront tous la même conclusion : une catastrophe économique est à nouveau en préparation. Il est plus qu’urgent que l’état mette un terme à ses interventions délétères et qu’il arrête de se vautrer comme un gros pachyderme velu dans une dette gluante et mouvante. La réelle libéralisation du marché immobilier, la re-responsabilisation des emprunteurs, des propriétaires et des locataires, les simplifications administratives deviennent plus qu’urgentes si on veut éviter la pluie de calamités qui s’abattra sur le pays.

On peut le dire pudiquement dans un rapport comme celui-ci, en expliquant que “la solvabilité de l’Etat est en danger à terme“, ou faire preuve de lucidité et l’annoncer clairement du maintenant traditionnel “Ce Pays Est Foutu”.

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Commentaires34

  1. jb7756

    Le manque de terrain constructible est une calamité, surtout autour de Paris.
    Mais il n’y a pas que l’état qui est en cause. Il y a plein de riverains qui au moindre projet de lotissement montent des associations et attaquent. Les gens sont égoïstes et font tout pour préserver leur petite tranquillité. Il faudrait donc aussi supprimer toutes les possibilités de recourt des voisins.

  2. Epicier vénéneux

    Oui. Ou alors, on construit des villes nouvelles avec de larges avenues se croisant à angle droit et avec des systèmes de contre-allées et plein de commerces et, aux abords de ces villes, de ravissants quartiers résidentiels étalés sur des dizaines de km² avec de belles maisons avec deux garages chacune.

    En clair, ce pays manque cruellement de villes de 50 000 habitants, suffisamment petites pour être agréables, suffisamment grosses pour que les gens n’aient pas à habiter à 50 km de leur lieu de travail, suffisamment modernes et économes pour ne pas avoir à construire des transports en commun dispendieux et sous-utilisés et qui font la part belle à – je vous le donne en mille – la voiture.

  3. philippulus

    “ajouter l’insulte à l’injure” est une mauvaise traduction de “add insult to injury”.
    “injury”, c’est une blessure en anglais.
    Non seulement on vous fait du mal, et en plus on vous méprise…

    1. Oui non sauf que là c’était voulu précisément parce qu’injure et insulte sont des quasi-synonymes en Français… Bon. Manque un smiley ?

      1. Flak

        ah ah ca me rappelle l’imprimeur d’Achille Talon qui lui retraduit ses jeux de mots en francais normal..

    2. Lucilio

      “…« ajouter l’insulte à l’injure » est une mauvaise traduction de « add insult to injury »…”

      Pas vraiment. La locution d’origine est latine : “injuriæ contumeliam addere” (ajouter l’injure à l’affront). Donc, non seulement employer “ajouter l’insulte à l’injure” est parfaitement valable, mais donne un meilleur rendu de la locution latine d’origine que la traduction anglaise.

  4. seb

    Mais l’inflation a un effet interessant pour un propriétaire immobilier qui a emprunté a taux fixe et qui loue son bien.
    L’indice des loyers, meme s’il a été trafiqué a mort pour s’éloigner du coût de la construction, ne pourra pas résister a cette inflation et l’intègrera bon gré mal gré..
    On a d’un côté un coût fixe (remboursement de loyer) et de l’autre un revenu (loyer encaissé) qui augmente a cause de l’inlation. En terme de gestion de trésorerie, ce phénomène est donc intéressant.
    Mais le bénéfice de l’opération est obéré de la même façon par l’inflation.

    Les propriétaires actuels ont tout intérêt a empêcher toute réforme du droit d’occupation du sol car le seul interêt d’une opération immobilière réside dans l’augmentation potentielle du prix du bien. Et si le marché s’ouvre, les prix baisseront inévitablement…

    1. Miamat13

      “On a d’un côté un coût fixe (remboursement de loyer) et de l’autre un revenu (loyer encaissé) qui augmente a cause de l’inlation. En terme de gestion de trésorerie, ce phénomène est donc intéressant.”
      Et a croiser les doigts que le locataire continue de payer => hausse des salaires (le fameux second tour)…..
      Attention Stagflation méchante en approche

  5. Baltazar

    Mon coeur s’est emballé à la lecture du titre de ce billet : j’ai cru qu’H nous entretiendrait aujourd’hui de nos petits tracas monnétaires. Eh non …

  6. simple citoyen

    L’origine de l’expression “add insult to injury” est très ancienne, probablement 17ème si ce n’est avant.
    Injure et insulte ont des etymologies différentes, identiques en français et anglais: injure/injury: contre le droit, injustice et insulte/insult: sauter sur.
    Le mot “injury” faisant partie des mots “importés” du français vers le 14ème siècle.
    Le sens de “injury” est bien celui d’une blesure au sens de l’atteinte faite à une personne ou une chose, concept plus large que la seule blessure physique, dont l’expression courante pour désigner les blessés dans des accidents par exemple, tend à restreindre le sens initial.
    Voir par exemple: http://www.thefreedictionary.com/injury
    Traduire donc par “ajouter l’insulte à l’injure” me semble très correct et dans l’étymologie et le sens exact des mots. On a simplement tendance de plus en plus souvent à ne retenir qu’un sens restreint ou une seule des définitions, par facilité de compréhension. 😉

  7. Curmudgeon

    Franck Dedieu, “La création monétaire a peu d’effets sur l’inflation”, L’Expansion, 2 février 2011. Néanmoins, y’a de la bulle bien irisée dans l’air…

    1. Théo31

      Mr Dedieu aurait dû aller une semaine au Zimbabwé avant de pondre son étron journalistique.

      Ou lire ce que l’école autrichienne a écrit à ce sujet.

  8. Manassas

    Le mot d’ordre est lancé : tous propriétaires !! Encore un marché sur lequel l’Etat et ses gros doigts boudinés vont encore tripatouiller.

    Ca sent méchamment la pâté (de maisons) cette affaire-là et ça ne peut que se terminer dans les larmes et des cris d’orfraies.

    1. Epicier vénéneux

      Comment ça, “les banquiers ne veulent pas vous prêter car ils ne vous croient pas capables de rembourser” ? Attendez, laissez-moi passer un coup de fil à la CDC, qu’elle se porte garant pour vous.

  9. ME

    Pour répondre à la question “Ce serait le bon moment pour vendre avant que ça ne baisse ?”…. Cela dépend car tous ce système n’est il pas qu’il affaire de confiance (et de cofinance) entre le bourreau et l’opprimé et ceux tant au niveau national qu’international ? Je sais, je réponds à une question par une autre question

  10. frenchhorn

    « Cela dépend car tous ce système n’est il pas qu’il affaire de confiance (et de cofinance) entre le bourreau et l’opprimé et ceux tant au niveau national qu’international ? »
    Qu’est-ce que c’est que ce charabia patouilleux ?

    1. Oh, c’est vrai que Trichet est tout à fait autrichien dans sa façon d’envisager l’économie.
      Ah ah ah.

    2. Georges Kaplan

      flo,
      Il n’est pas vraiment question de taper sur JCT. Il n’y est pour rien, on lui a donné un mission impossible: diriger une banque centrale. Ni Greenspan, ni le Bear’Nanke ni personne ne peut se substituer au marché.

  11. adnstep

    Ne vous en faites pas, l’immobilier va baisser.
    Il y a deux ans, les stocks des promoteurs montaient à 30% du portefeuille. Vu le krach immo partout dans le monde, nos sages gouvernants ont du prendre des mesures sévères pour écouler le stock d’invendus : ainsi, l’an dernier, 65% des ventes neuves l’ont été en Scellier.

    Aujourd’hui, les promoteurs ont tous écoulé leur stock (moins de 5% d’apparts en stock chez Nexity, par exemple). Incidemment, le taux des prêts immobilier, dont on nous disait que c’était un produit d’appel des banques, et qu’il n’augmenterait donc pas, repart à la hausse (1/2 point en quelques semaines). De même, les conditions pour le Scellier se sont (un peu) durcies.

    Bref, maintenant que les copains ont sauvé leurs fesses, le bal des cocus va pouvoir commencer.

    Mais pas avant les élections de 2012, ça ferait pas propre.

  12. voiture occasion belgique

    Merci pour ces eclaircissement.
    Au moins on comprend qu’on est pas completement dingue. Les prix augmentent !

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