Les joies multiples de la gestion d’entreprise en France

Tu es jeune, tu viens de décrocher un beau diplôme ou tu as la niaque et tu veux toi aussi découvrir les joies du capitalisme, être ton propre patron et vivre le Rêve Français, commencer tout petit et terminer les poches remplies d’euros après ton introduction au CAC40 ? Alors n’hésite plus, découvre les joies de l’entrepreneuriat en France et crée ton entreprise ! Tu verras, c’est super !

Ah oui, au fait, si tu te lances, tu auras peut-être à te préoccuper de certaines tâches administratives. Et rapidement, tu comprendras qu’une fois devenu patron de ta petite entreprise, tu as en fait signé … un contrat de mariage avec l’État.

Et question vie commune, tu vas voir qu’il ne te lâchera pas d’une semelle. Oh, non pas qu’il soit particulièrement amoureux de toi (ni toi de lui, tu verras). Simplement, comme souvent dans les mariages arrangés, il faut s’attendre à ce que ton partenaire soit uni avec toi pour le meilleur, le pire, et surtout pour ton argent.

cercueil commercants artisansEt il est gourmand, le bougre. A tel point que fleurissent actuellement d’étranges panneaux (en forme de cercueil) dans les vitrines de commerçants de plus en plus nombreux, excédés de voir leurs charges exploser alors que leur chiffre d’affaire stagne et leurs conditions de travail restent parfaitement identiques. Il faut dire, on les comprend ; comme l’explique cet article du Monde, le coiffeur d’une petite commune découvre que pour le 4ème trimestre 2013, il doit maintenant payer 7135 euros de taxes, contre 6439 pour le précédent sans que ses tarifs ou le nombre de ses employés aient varié.

Amer constat relayé par le journaliste :

« Tout est pris par l’État », se fâche le coiffeur, appuyant sur le dernier mot comme s’il nommait un ennemi personnel.

Comme si ? Ah mais non, mes braves. L’État est bel et bien la seule entité actuellement en France qui peut se permettre d’être l’ennemi personnel d’un nombre toujours grandissant de petits patrons, d’artisans ou de commerçants.

Et ce n’est pas fortuit, ce n’est pas par erreur ni sur un malentendu : c’est parfaitement délibéré. Cela n’est que le résultat inéluctable de quarante années de politiques débiles, contre-productives, collectivistes et énarchiques déconnectées de toute réalité de terrain.

Eh oui : les 2000 milliards de dettes qui ont été accumulés pour satisfaire tout le monde en protégeant tout le monde derrière des services publics toujours plus nombreux, toujours moins budgétés, toujours plus coûteux, en distribuant des roudoudous sociaux à qui en demandait, ces 2000 milliards, il va bien falloir les payer à un moment ou un autre. Et avant même d’en arriver à cette colossale montagne de dettes, il va aussi falloir payer les dizaines de milliards de déficits que chaque gouvernement enregistre de façon décontractée comme bilan de ses exactions au pouvoir pour chaque année écoulée.

Or, l’argent ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval. Il n’est qu’à un seul endroit, dans les poches des consommateurs, et dans les comptes des entreprises qui leur fournissent des biens et des services. Pour les premiers, on va taxer et imposer. Pour les seconds, on va imposer et taxer encore plus (parce que ce sont des salauds de patrons, ne l’oublions pas). Moyennant quoi, on va saigner tout ce qui peut saigner.

Malheureusement, quand on y regarde de plus près, passer des cercueils factices à but revendicatifs à des cercueils réels, bien destinés à rejoindre la terre, il n’y a même pas un pas. Parce que si les premiers cercueils représentent la mort des centaines de petites entreprises et de boutiques d’artisans en France, massacrées par les impôts, les charges et les tracasseries administratives kafkaïennes et permanentes, les seconds cercueils, eux, sont ceux de tous ces patrons qui se suicident.

mort au patron

La presse n’en a guère parlé, mais les chiffres sont là, accablants, et bien plus graves que ceux des suicides à la Poste ou à France Télécom, qui déclenchent pourtant l’hystérie des médias. Ils sont même pires que ceux des suicides à l’Éducation Nationale (que, pour le coup, les médias ne relaient jamais, alors qu’ils sont aussi préoccupants). Et quand la presse parle de ces suicides de patrons, c’est fort discret. Pourtant, on parle de deux suicides par jour

Et comment ne pas sérieusement envisager le suicide lorsqu’on se retrouve, tous les jours, à devoir batailler contre une administration tentaculaire et parfaitement obtuse à vos difficultés qu’elles ont en général créées en premier lieu ? Quelle voie de sortie honorable lorsqu’on se retrouve confronté, tour à tour ou en même temps, aux cancrelats du fisc, des URSSAF, de l’inspection du travail, des douanes, des administrations communales, départementales, régionales, nationales, des collecteurs de la SACEM et toute l’imposante myriade de directions diverses et variées de l’une ou l’autre administration spécifique (ou non) à votre domaine d’activité dont l’existence est justifiée par son activité, activité qui consiste à récupérer auprès de vous des informations que les autres ont déjà collectées et des taxes aussi diverses qu’incompréhensibles ?

J’exagère ? Malheureusement, les exemples sont pléthores d’entreprises ou d’associations poursuivies pour des motifs tous plus douteux les uns que les autres, dans un environnement législatif plus que mouvant.

Pour illustrer le côté « motifs douteux », on peut prendre le cas soufflé par mon ami Olivier Vitri (qu’on peut suivre sur Twitter ici) :

Une association loi 1901 de plongée, qui emploie quelques salariés, risque la faillite suite à un redressement fiscal décidé par une administration dont on sent que la motivation première n’est absolument pas l’activité économique et la sauvegarde de l’emploi mais les simples rentrées fiscales, coûte que coûte.

Quant à l’environnement législatif festif, citoyen et tous les jours plus complexe, il me suffira d’évoquer le tout récent projet de loi qui vise à obliger les spectacles vivants à payer leurs bénévoles. Il semble que les ministres de la Culture et du Travail, jugeant sans doute n’avoir pas assez fait de dégâts avec leurs précédentes exactions, se sont apparemment décidés à obliger tous les spectacles vivants à payer les bénévoles qui travaillent pour eux, comme les sons & lumières, bagad bretons et autres fanfares.

En effet, comme ces spectacles fonctionnent très bien (à l’instar de celui du Puy-du-Fou), il fallait légiférer ! Et quoi de mieux que considérer les bénévoles y participant comme des travailleurs dissimulés ? Et quoi de mieux que les soumettre au droit du travail, ce qui oblige à leur rémunération ? Pas difficile de comprendre ici que l’intérêt de la manœuvre est de récupérer les mannes financières que ces spectacles brassent parfois, de façons directes ou indirectes, et de collecter ainsi de dodues cotisations alors que les caisses, déjà exsangues, sont sur le point de faire faillite. Les catastrophes économiques qui en résulteront ensuite ne sont évidemment d’aucun intérêt dans le cadre de cette gestion de court-terme à laquelle on est maintenant habitué en France.

Bref : qu’on soit une association, qu’on soit un spectacle vivant reposant sur des bénévoles, qu’on soit un artisan, un commerçant, un petite entreprise, peu importe : la gestion d’entreprise en France devient tous les jours plus joyeuse. Et comme l’État s’arroge tous les jours une part plus importante de la richesse produite, comme les politiciens ne voient dans ces entreprises qui fonctionnent qu’une source de plus à ponctionner, comme les administrations ne voient en elles qu’une nouvelle justification pour leur raison d’être, de faillites en suicides et de dépôts de bilan en fermetures définitives, le pays ira inéluctablement à sa déroute.

Ce pays est foutu.

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Commentaires298

  1. Adrien

    Notre très chère minustre du Commerce, de l’Artisanat, du Tourisme Appliqué à Soi-Même Quand On Paye Pas, des Petits Fours par Douzaines et des Inaugurations de Tout et Surtout de N’Importe Quoi, j’ai nommé Sylvia Pinel, a finalement dû annuler un déplacement prévu en fin de mois à Mende (12000 habitants) pour cause de trop grande proximité avec les élections municipales.

    C’est pas de bol. Elle venait gratifier de sa noble présence la construction d’une nouvelle maison des artisans située dans la ZA du Causse-d’Auge. Après l’inauguration d’une toiture il y a quelques jours, une maison entière, c’était quand même le niveau d’après ! Les élections, quand on est minustre des Inaugurations, c’est décidément trop pas juste.

    http://www.48info.fr/article/12/02/2014/sylvia-pinel–la-ministre-de-lartisanat–du-commerce-et-du-tourisme-viendra–mende-/1318

  2. Jeremy

    « les 2000 milliards de dettes qui ont été accumulés pour satisfaire tout le monde en protégeant tout le monde derrière des services publics toujours plus nombreux, toujours moins budgétés, toujours plus coûteux, en distribuant des roudoudous sociaux à qui en demandait, ces 2000 milliards, il va bien falloir les payer à un moment ou un autre ».

    J’aime bien votre blog, quelquefois surtout pour sa mauvaise foi. Reste plus qu’à nous expliquer d’où elle vient cette dette, de quand elle date, comment elle s’est constituée, à qui elle profite, combien de fois des gouvernements de tous bords confondus ont pu régler le problème et ne l’ont pas fait (Giscard, Chirac, Sarkozy par exemple), et on aura avancé.

    1. Et tu veux pas aussi que je te noue tes lacets et que je te file la purée à même la bouche aussi tant que t’y es ? Comme tu as manifestement les réponses à tes questions, je t’en prie, éclaire nous de tes profondes lumières pour que nous rions ensemble.

      1. trottinette

        C’est même grave ce qu’il raconte là. Tout va bien dans le meilleur des mondes. Fourmi d’un coté, cancrelat de l’autre. 2000 on ne doit pas en être trop loin. Déjà de tête 1000 pour l’état, le reste sécurité sociale, caisse vieillesse, caisse chômage, tous les étages administratifs niveau des régions et collectivités locales. De toute manière H16, tu peux même y aller à la louche, c’est trop gros maintenant (comme dirait une banque).

    2. bob razovski

      Ca changera quoi ?

      On vous diagnostique un cancer, et au lieu de vous soignez vous cherchez à savoir quand il a commencé à se développer ?

      Mettons qu’on vous dise (je science fictionne, c’est pour l’exemple)

      – la dette a démarré en 45
      – elle s’est constituée parce que l’état a dépensé plus qu’il n’avait le droit
      – elle a profité a plein de monde, dont une grande partie est aujourd’hui cannée
      – tous les gouvernements en place depuis lors n’ont jamais rien fait pour stopper la machine, se contentant d’en remettre une couche et de refiler la patate chaude au prochain

      Vous voilà vachement avancé. Avez-vous donc des solutions ?

      1. Ne vous inquiétez pas, Jeremy a bien tout compris. Après avoir maté tous les épisodes de l’Argent Dette et avoir écouté religieusement Asselineau et l’autre zigoto dont le nom m’échappe, il va nous sortir qu’en réalité, tout ça vient de (roulement de tambours) cette saloperie de loi de 1973 machin truc chouette et que c’est là que c’est grave sans compter qu’en plus on ne paye plus que les intérêts patati et patata.

        Après quoi, il se fera plonker parce qu’il ne sait pas de quoi il parle et dit des bêtises.

    3. rico

      Dans votre bienveillance un exemple de l’autre gauche eût été agréable, au lieu de bassement nous citer les trois derniers rois de gauche « (Giscard, Chirac, Sarkozy par exemple) ».
      M’enfin, à votre contraire je suis ici pour lire et profiter du « ton » donné.
      Merci au passage d’ailleurs, j’adore trainer ici tous les jours.

      1. LNB

        Oui un petit exemple parce qu’à la limite, je trouve qu’il est plus grave d’avoir aussi peu remboursé les dettes sous Jospin alors qu’il y avait de la croissance… Et on nous a doctement expliqué que DSK (vrai auteur des 35h, ne l’oublions pas) était un grand économiste.
        Le moins mauvais des 30 dernières années d’appelle Thierry Breton. J’ai bien dit le moins mauvais et en se plaçant uniquement sur le front de la dette.

  3. FaLLaWa

    Ah non pas touche au Puy du Fou !! Jy suis retourné l’ete dernier et c’est vraiment un chouette endroit! Si j’apprends que le parc a des difficultes financieres a cause du fait qu’ils doivent payer les benevoles, je m’engage dans la resistance!

    D’ailleurs quand on sait qu’un spectable son et lumiere comme la Cinéscénie est realisee grace a 1200 volontaires, s’il fallait les payer j’imagine qu’un paiement symbolique de 10eur par spectable ne serait pas envisageable par les textes…

    1. Raynote

      J’habite à 10 km du Puy du Fou et j’entendais il y a une dizaine de jours sur une radio nationale, son président déclarer sans ambages: si on nous oblige à payer nos bénévoles le Puy du Fou ferme ses portes!
      Sachant toute l’activité économique générée dans le « Haut-Bocage » par ce parc de loisirs, ce serait tout bonnement catastrophique.

  4. tabbehim

    cher h16,

    je vous laisse vous esclaffer devant ceci 🙂

    http://www.20minutes.fr/politique/1297734-hollande-brocarde-le-president-du-medef-devant-les-francais-de-san-francisco

    les gros doigts politicards français n’ont peur de rien 🙂

    http://www.20minutes.fr/high-tech/1297666-20140213-francois-hollande-inaugure-french-tech-hub-coeur-silicon-valley

    et il veut nous faire croire qu’il aime les entreprises en plus

    http://www.20minutes.fr/societe/1297942-20140213-video-etats-unis-hug-hollande-a-pigeon

    ahhhhhh les doigts politiques de maman état 🙂

    1. Black Mamba

      « Etes-vous capable aujourd’hui d’embrasser vraiment les entrepreneurs et de leur faire un hug?»
      Quel horreur le baiser de Judas… encore de nos jours !!!

  5. JS

    Ce qui est hallucinant c’est les commentaires à ce genre d’articles sur des sites comme ceux de l’imMonde.

    Ça donne envie de se barrer..et qu’ils se démerdent tous pour financer leurs petits statuts et avantages avec leur propre sueur.

  6. kloupa

    Apprécions quand même à sa juste valeur le cynisme de Hollande, qui après avoir vu monter le chômage pendant deux ans, grâce à sa politique débile, s’est défaussé sur les patrons, qu’il a soigneusement pompés et mis en faillite, avec son pacte de responsabilité. Aux yeux de l’opinion aveugle, s’il n’y a pas d’emplois, ce n’est pas à cause des conditions économiques en France, générée par l’Etat , son administration et la législation, mais c’est par manque de reconnaissance envers l’amour qu’il a soudain démontré pour l’entreprenariat. Des salauds, ces patrons! Et ça tombe bien; bientôt, les élections, alors il faut bien qu’il trouve des boucs émissaires aux malheurs qu’il a généré.

    1. yp

      J’ai déjà parlé des mésaventures d’un de mes amis entrepreneur aux prises avec la gestapo urssaf.

      Ca me fait mal au coeur de voir ce que ces traîtres vont faire de ce pays.

      C’est la volonté du peuple souverain, comme on dit…

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