En France, les prisons sont solubles dans la politique

La prison, vraiment, c’est trop pénible ! Et puis, en France, les prisons sont trop pleines, comme une boîte qui déborde. Alors un gentil rapport explique que pour faire de la place, on devrait laisser sortir un peu plus tôt certains détenus, sauf bien sûr les méchants qui ont fait des choses très très graves.

Et si vous avez l’impression que les autorités vous prennent pour des enfants immatures, c’est exact mais cela ne changera rien : oui oui, vous avez bien lu le premier paragraphe et oui oui, il est bel et bien question d’une réduction de peine exceptionnelle pour tous les détenus pour résoudre la surpopulation carcérale actuelle.

L’idée générale est d’une simplicité biblique : puisqu’il y a trop de détenus, réduisons les peines, cela libèrera de la place ! Et pour bien faire comprendre les enjeux et toute la difficulté des conditions de détentions actuelles, vite, vite, réalisons l’un ou l’autre reportage pour décrire la situation avec toute l’objectivité des médias officiels !

L’avantage d’y aller aussi gaillardement, c’est que personne ne s’appesantira sur la notion pourtant étonnante de « trop de détenus » et qu’avec un peu de travail, on pourra faire oublier l’état exact des conditions de détentions dans les établissements français qui, si elles sont loin d’être bonnes – les cellules insalubres sont encore nombreuses, c’est un fait bien documenté – passera probablement un peu trop vite sous silence les aménagements actuels qui offrent une discipline qu’on pourra pudiquement qualifier de moins stricte que celle d’Alcatraz ou de Shawshank par exemple.

Il apparaît en effet que, parfois, à la faveur d’une diffusion sur les réseaux sociaux, le public découvre les étonnants passe-droits, aménagements et largesses dont bénéficient sinon tous les détenus, au moins certains et parfois les plus emblématiques. L’un des derniers exemples en date concernait par exemple Mohammed Amra dont on imagine sans mal que la détention n’était pas tout à fait un calvaire, exposant assez bien à quel point le système carcéral français était lui aussi sujet à la même corruption, au même laxisme et aux mêmes impunités que le reste de système judiciaire français.

En pratique, on le sait et c’est assez bien établi : les peines de prisons sont en réalité sous-utilisées. Rappelons d’ailleurs qu’il s’agit d’un laxisme institutionnalisé comme l’a montré une récente étude parue en février dernier et dont ces colonnes faisaient part à l’époque ; concrètement, lorsque la loi fixe des planchers, la justice effective les divise par deux ou trois et dix ans de prison se transforment en trois par la magie de jugements accommodants, de remises de peines et d’aménagements bricolés qui permettent à des condamnées à 20 ans de réussir l’exploit d’être pourtant multirécidivistes et multi-condamnés dans la même période.

De surcroît, lorsqu’on épluche les chiffres, on observe que sur les quasiment 100.000 personnes « sous écrou », la réalité oblige à noter que plus de 17.000 ne sont effectivement pas dans une cellule mais sous bracelet électronique (comme un ancien président de la République, par exemple) ou bénéficient d’un placement à l’extérieur. Autrement dit, l’utilisation de moyens alternatifs pour éviter les quatre murs d’une cellule sont déjà largement utilisés : si le gentil rapport qui préconise de relâcher plus tôt les pas-trop-méchants ne propose pas en échange d’augmenter la distribution de bracelets, c’est essentiellement parce que les équipes dédiées pour la gestion des détenus sous bracelets sont déjà surchargées.

Bien évidemment, le problème intrinsèque de ces gesticulations judiciaires qui seraient comiques s’il ne s’agissait pas de personnes condamnées donc a priori devant être écartées de la société civile, c’est que le laxisme actuellement institutionnalisé nourrit le laxisme.

D’un côté, ce laxisme est l’excuse pratique et clairement utilisée pour ne pas faire déborder les prisons – c’est même l’excuse directement utilisée par le rapport pour proposer un laxisme posé comme pragmatique – et de l’autre, on pousse à utiliser des peines alternatives (bracelet, liberté conditionnelle, sursis) afin de limiter l’usage de la détention, ce qui servira d’excuses pour ne pas construire de prisons supplémentaires.

En somme, de façon évidente, l’État n’est plus ici en train de gérer des détenus et d’essayer de trouver un moyen pour juguler la violence qui augmente dans la société. L’État, en toute décontraction et en l’expliquant presque ouvertement aux contribuables qui le financent, réalise une simple gestion logistique des flux en faisant ce qui lui paraît nécessaire pour que les contenus (ici, les condamnés) n’engorgent pas les tuyaux (ici, les prisons).

Dans ce contexte, les tubulures étatiques autorisent un flux constant d’environ 80.000 détenus, et dès qu’on est au-dessus, on a « trop de détenus » (i.e. les tuyaux sont sous pression et la pression, c’est mauvais pour le système, voyez-vous).

Magnifique système qui permet de gérer l’incarcération à rebours de ce que demandent les honnêtes gens : on n’incarcère plus en fonction des crimes, mais seulement en fonction des places. Si l’actualité produisait soudainement une floppée de criminels endurcis, on libérerait une floppée de petites frappes pour conserver l’incarcération courante dans le niveau de bande passante carcérale acceptable.

C’est lunaire : la surpopulation sert ici à justifier la désincarcération au lieu de justifier la création de cellules supplémentaires nécessaires à gérer l’augmentation naturelle de la population carcérale.

Et c’est d’autant plus lunaire que, dans le même temps, les bourgeois et la classe jacassante commencent à se réveiller sur certains problèmes qui pourrissent la société depuis maintenant plusieurs décennies et pour lesquels l’actuel ministre de la Justice espère faire croire qu’il agit :

Que peut-on espérer d’une telle gestion à la Gribouille où plus les uns se concentreront sur tel ou tel problème de société, plus il faudra compenser les incarcérations nécessaires par des remises de peine pour les autres ?

Et surtout, qu’espérer de ces dirigeants, de cette caste et de ces politiciens alors que les contribuables n’ont jamais été autant écrasés d’impôts pour un résultat si phénoménalement catastrophique ?

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Commentaires51

  1. Aristarkke

    Faut dire aussi que construire des prisons pour répondre convenablement à l’offre de délinquants à incarcérer, ça coûte : non seulement les murs à construire mais aussi le personnel à embaucher et à payer plus plein de frais accessoires.
    Or l’état grançais se comporte toujours comme un Picsou ! Et puis à collecter si peu d’impôts et de taxes, forcément que les fins de mois sont difficiles. Forcément !

    1. Aristarkke

      Les frais accessoires : par exemple, organiser des sorties muséales ou de piscine en semant, de ci de là, des spécimens de racailles dont il faut ensuite courir après pour les réintégrer…

    2. breizh

      la Justice, cela coûte, mais moins que les délires de transition énergétique, de wokisme, d’arrosage de copains…

      1. Gaston

        Interdit par les conventions internationales.
        Aux US le statut spécial des prisonniers leur permet de contourner cette limitation (en gros ils perdent leur citoyenneté avec la condamnation).

  2. CPB33

    les prisons françaises/européennes sont des camps de vacances à coté de celles des USA (ou des autres pays : Est, Asie ou Amérique du Sud par exemple)

    1. breizh

      certes, mais vu l’instabilité juridique française, n’importe qui peut s’y retrouver (en prison) et pour des motifs parfois lunaires… C’est d’ailleurs une des causes de la surpopulation carcérale.

      1. Unmeusien

        Tout à fait. J’ai un ami de longue date ( travaille dans le BTP,et ses fils au fil du temps passant,travail très dur d’étanchéité de toits,cet ami m’expliquait que ce n’est pas le soleil qui vous cuit ou l’hiver qui vous congèle le plus dur, c’est le vent a subir) un de ses fils qui joue au foot avec le mien a été condamné à un mois de prison ferme pour conduite sans permis et légère ébrieté.

  3. Blondin

    Et notre brave Manu qui explique hier, tranquillou, qu’il est prêt à louer des places de prison à l’étranger.
    Je ne me suis pas infligé de regarder ce pitre (il y a des limites à mon masochisme) mais j’imagine que la courge molle qui l’a interviewé ne lui a pas fait remarquer qu’en huit ans, il aurait eu le temps de construire des prisons.

      1. nemrod

        Meuh non un brave gars bien comme y faut.
        Et courageux avec ça .
        Il est contre Trump, Poutine, le rechaufmik la mort, maladie , les brimades sur les chatons, lgbtp+ friendly et contre les fachos strème droettes…
        Si c’est pas une preuve !

          1. Blondin

            Gilles Bouleau est une endive comme il y en a beaucoup dans les merdias
            Mais mon propos visait plus le jean-foutre (oui je sais ça date un peu mais j’ai envie de réhabiliter cette expression – qui va si bien à EM) qui nous sert de président.
            Oser parler de sécurité quand on a un bilan aussi minable, c’est franchement consternant (remarque valable pour les finances, la défense, la diplomatie…).
            Qu’il continue son « en même temps » ridicule alors que, de toute façon, il n’a plus rien à perdre, est absolument consternant.

  4. Habeas Corpus

    Il aura fallu 20 ans pour passer , péniblement, de 50 000 à 60 000 places.
    En 1957 , il y a avait 20 000 détenus.
    Comme si, en 70 ans, avec l’essor sans précédent des « racailles » , il fallait seulement faire x3.

    Construisez 30 000 places et VITE !

  5. CPB33

    bientôt Sam arrêté pour terrorisme….
    epochtimes.fr/pneus-mortels-vers-une-inculpation-de-goodyear-par-un-juge-francais-2957304.html

  6. perecolateur

    Jamais compris ce besoin d’enfermer des gens au frais du contribuable.
    Il y a des alternatives bien plus économiques expliquées de façon très didactique par Sir Leodagan.

  7. Mildred

    Je me demande, Patron, pourquoi vous vous énervez sur les prisons, alors qu’hier Macron était d’accord avec vous sur tout ce qui concerne les prisons et les prisonniers ?

  8. nemrod

    HS
    Binoche en Vierge Marie de l’Immaculée Conception grimpant les marches…
    Elle me fait furieusement penser à cette vieille blague :

    Jésus fend la foule qui lapide une pécheresse
     » que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ! »
    Une énorme pavasse surgit alors de la foule et s’écrase sur la tête de la malheureuse.
    Jésus regarde et dit :  » Maman tu trouves pas que tu en fait un peu trop, quand même ? « 

        1. nemrod

          Je n’avais aucune crainte, Pierre est un de ces chrétiens ( nombreux) qui ont le sens de l’humour.
          Ce qui est rarissimes pour d’autres religions…surtout une.

      1. Blondin

        Binoche est une caricature de ce que l’absence de véritable culture générale et la soumission au wokisme peuvent produire de pire.

        Comme le disait Richard Widmark : « Je pense qu’un acteur doit faire son travail et ensuite la boucler ».

        1. nemrod

          Deuxbouses avait fait une vanne sur le cinéma d’auteur et elle lui en veut encore.
          Elle m’a l’air d’avoir autant d’humour que le bouledogue de mon frangin…

  9. breizh

    Et pendant ce temps, la peine de mort est en train de revenir (mais pas pour les criminels) : youtube.com/watch?v=yyjNzzoc12Y

  10. Gerldam

    Les estimations de l’inutile (voire le nuisible) varient. Certains disent 150 milliards. Pour d ‘autres, c’est le double (tout dépend de la définition de l’inutile. Perso, je penche plutôt vers 500 milliards.
    Quoi qu’il en soit, il y a largement de quoi doubler le budget de la justice, le parent pauvre de cet état branquignol, et de construire les 50000 places de prison supplémentaires (en prévoyant le pire, qui ne manquera pas d’arriver).

  11. Grosminet

    Le bandeau de l’article de rance tout faux :
    « La surpopulation carcérale contraint plus de 4 580 détenus à dormir sur des matelas posés à même le sol »
    Vous vous rendez compte, ils dorment par terre les pauvres. C’est intolérable.

  12. bibi

    Ce n’est pas 50000 places de prisons qu’il faut construire mais 200 000 au bas mots, si l’on veut que les condamner actuel fasse leur peine, et que le flux entrant fasse la sienne, en supprimant evidemment l’abominable confusion des peines.
    Il faut aussi en finir avec les remises de peines pour bonne conduite, la bonne conduite c’est le minimum que l’on doit attendre d’un prisonner, et tout délit ou crime commis en prison devrait valoir allongement de la peine.

    1. nemrod

      Non mais 50000 ou 200000, on les construira pas …à moins d’un gros changement à tout points de vue que j’ai du mal à imaginer.
      Pas la peine de se torturer l’esprit, c’est du vent comme tout le reste.
      Le seul truc certain c’est qu’ils vont pomper notre fric par tous les moyens .
      Ce sont des voleurs…ils vont pas construire des prisons.

  13. Grosminet

    « l’état exact des conditions de détentions dans les établissements français qui, si elles sont loin d’être bonnes – les cellules insalubres sont encore nombreuses, c’est un fait bien documenté »
    Mouais… par rapport à chez nous, c’est du 3 étoiles… ici, en ce qui concerne les places de prison, la règle est simple : tant que tu peux fermer la porte ça veut dire qu’il reste de la place. Certes, l’état roumain perd régulièrement des procès à la CEDH, mais le fait est que si tu as pris de la ferme, place ou pas place tu y vas.

  14. Andre

    Pourtant, il y a des exemples qui ont porté leurs fruits. Nos politiques aiment bien prendre des exemples quand ça va dans leur sens, mais pas quand ça ne va pas dans leur sens.

    Prenez Joe Arpaio, il avait des solutions :

    – Le port obligatoire de caleçons et tee-shirt roses en prison, en réponse à un trafic qui se produisait avec les anciens caleçons noirs.

    – Le port obligatoire d’un pantalon à rayures noires et blanches pour les prisonniers (Comme dans les années 1950 aux États-Unis.)

    – Arpaio décide de supprimer tous les « luxes » de ses prisons comme le café, ou la télévision. Les seules chaînes autorisées sont la chaîne politique locale, la chaîne météo et Disney Channel.
    Quand on lui a demandé pourquoi la chaîne météo, il répond « pour que ces abrutis sachent quelle température il va faire quand ils travailleront sur les routes avec des chaînes aux pieds ».

    Dans le milieu des années 1990 les prisons deviennent surchargées, et il est impératif de construire un nouveau complexe. Il est alors proposé une prison de 40 millions de dollars. Le shérif refuse de faire payer une telle somme au contribuable et crée une prison faite de tentes entourées de barbelés au milieu du désert qui ne coûtera que 100 000 dollars.

    Aux critiques adressées à ces prisons-tentes, jugées inhumaines, le shérif rétorque : « Quand je me promène dans la cour, les détenus viennent me voir, je leur demande de parler franchement de leur séjour. La plupart disent qu’ils préfèrent les tentes à la prison en dur. Sans doute le bon air et la lumière naturelle du soleil. Ce dont ils se plaignent le plus, c’est de la nourriture. Alors, je leur sors mon discours préféré : « Eh bien, si ça ne vous plaît pas, ne revenez pas. Et arrêtez de vous plaindre. Nos soldats, hommes et femmes, qui se battent pour vous en Irak et en Afghanistan vivent dans des tentes où les températures sont plus élevées qu’ici… alors, fermez-la ». »

    – Il a fait interdire toutes revues pornographiques ou érotiques.

    – Il a fait confisquer le matériel de musculation, et déclare : « Ils sont en prison pour payer leur dette à la société, et non pas pour se muscler pour pouvoir aller dès leur sortie agresser des innocents ».

    – Alors que nourrir un détenu coûte en moyenne 8 dollars par jour aux États-Unis le shérif s’en sort pour 60 cents par jour. En 15 ans passés à la tête du comté de Maricopa, Joe Arpaio a réduit les frais carcéraux de 500 000 dollars par an.
    Le soir, la télévision diffuse un programme une sorte de « Bonne nuit les petits » où le shérif apparaît pour retransmettre son « programme éducatif ».

    – Arpaio décide de remettre en place les chaînes de forçats (pratique arrêtée dans les années 1950 par tous les États d’Amérique). De plus, il décide de mettre en place ces chaines pour les femmes également et déclare : « Pour les femmes je n’ai rien rétabli du tout puisque je suis le premier dans l’histoire de l’humanité à les enchaîner. Exactement comme si c’était des hommes. Et vous savez pourquoi ? Par pur souci d’égalité. »

    – Il décide de faire élever un immense mirador au sommet duquel clignotent de gros néons roses qui annoncent « Places disponibles ».

    1. Grosminet

      « Il décide de faire élever un immense mirador au sommet duquel clignotent de gros néons roses qui annoncent « Places disponibles ». »
      Mouarf 😀

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