Je ne lis pas Madame Figaro. Déjà, le Figaro a tendance à se classer dans les feuilles de choux amusantes à lire quand on est aux petits coins; son spin-off féminin m’a toujours fait penser à ces magazines qu’on distribue dans les TGV ou dans les avions de ligne, totalement creux, qui présentent des intérieurs aux agencements stylés et aussi glacés que le papier sur lequel ils sont imprimés, ou des pages de pubs pour des produits d’une futilité galopante comme des montres lourdement diamantisées qu’un Dray pourrait porter sans gêne. Mais cette fois-ci, j’ai été attiré par la présence rédactionnelle improbable d’une interview de Jean-François Copé, le mini-Lui de la République. Ni une ni deux, j’ai décortiqué.
Le sujet ? La parité. Pas de l’Euro avec le Dollar, non non. Ça, c’est de l’économie, du terre-à-terre ! C’est un truc un peu cracra qui donne les mains moites et qu’il faut s’empresser de ne pas traiter, voyons.
Il s’agit de la parité homme-femme dans les conseils d’administration des entreprises. Question absolument primordiale pour les Français. Enfin, surtout pour un Français, Copé : ça lui permet de faire parler de lui dans l’optique d’un job qu’il vise pour 2012 ou 2017, suivant l’usure du patron.
Et comme Mini-Lui a bien compris la stratégie générale de son mentor, le voilà tout effervescent sur des sujets annexes où il pourra dire plus tard « J’y étais », au moment où il faudra compter les points.
L’interview porte donc sur les moyens à mettre en oeuvre pour assurer une meilleure présence des femmes à la tête des entreprises. Et là, découverte de Jean-François : ces cons de patrons entendent s’entourer de gens compétents avant tout ! Evidemment, dans sa bouche, cela donne une chose un peu différente :
J’ai rencontré de nombreux dirigeants, et beaucoup en sont venus à me dire – sans plaisanter – que le principal obstacle à la nomination de femmes aux conseils d’administration était le manque de compétence. C’est un exemple parmi tant d’autres de l’approche machiste qui règne encore dans le monde du travail.
Evidemment, dit comme ça, ces cons de patrons sont misogynes ou machistes : les femmes autour d’eux ne sont pas assez compétentes pour les rejoindre dans les équipes de direction. Zut et crotte. Et là, peu importe, finalement, qu’ils aient raison ou tort, puisque de toute façon, on a déjà la soluce : on va faire une loi pour les obliger à changer d’avis.
En gros, ces cons de patrons pensent que la Terre est plate. C’est idiot, contre-productif, et ça va, à terme, ruiner leur efficacité puisque les autres qui, eux, auront eu la bonne idée de comprendre que la Terre est ronde en réalité, pourront réaliser des choses qu’eux ne pourront pas.
Et plutôt que de laisser ces patrons découvrir par eux-même qu’ils ont tort, on va leur imposer, par la loi, la Vérité :
- Article 1. La Terre est ronde.
- Article 2. Toute déclaration dans un sens contraire sera passible d’une amende de catégorie 1.
- Article 3. Toute récidive de déclaration contrariante sera passible d’une peine d’ostracisme assortie d’une amende de catégorie 2 et d’une mention dans le casier politique.
Vous voyez, fastoche ! Evidemment, on perd en raisonnement et en démonstration ce qu’on gagne en rapidité : d’un coup, tout le monde trouve la terre ronde, et personne ne moufte. C’est génial. On peut ainsi décliner à l’infini ce genre de lois et raboter les difficultés de la vie.
Avec une loi pour interdire les nombres irrationnels et une autre pour imposer une chemise propre tous les jours, on aura ainsi l’assurance d’un monde meilleur et enfin tourné vers des valeurs essentielles. Mini-Lui l’a bien compris : il faut, quand les gens sont rétifs, leur expliquer un peu – pas trop -, et puis bien leur cogner sur la gueule, ce qui permet d’attendrir la viande et de faire pénétrer les messages importants plus vite.
D’ailleurs, ces cons de patrons ne sont pas logiques pour deux ronds de carotte. Ils en sont restés aux bêtes schémas 5 = 5. Alors que tout le monde sait qu’en réalité, 5 peut valoir 4 ou un peu plus, ou parfois que 4 vaut approximativement 5 et emballez c’est pesé, y’a un peu moins mais sachons vivre :
Il faut que l’on cesse de considérer qu’une femme est moins efficace qu’un homme au seul motif qu’elle ne travaille pas le mercredi.
Vous voyez cet homme qui travaille 5 jours, et cette femme qui travaille 4 jours ? Eh bien ils sont efficaces pareil. Alors on va les payer pareil et l’homme, quand il dira « mécédégueulasse, je dois travailler 5 jours pour avoir autant qu’elle », on va lui répondre qu’il ne comprend rien de rien et que la Terre n’est pas plate. Con d’homme. Après, on le méprisera du regard parce qu’il est misogyne. Et s’il moufte, on le vire. Merde à la fin. Après tout, comme le dit Jean-François, …
Le défi est de laisser tomber la vieille dialectique droite/gauche du « travailler moins/travailler plus » pour entrer dans l’ère du « travailler mieux ». Car face à la concurrence de l’Asie et des États-Unis, avec un yuan et un dollar faibles, le capital humain est la plus grande richesse des pays européens.
Bon, évidemment, pour le dollar faible, il s’est planté, le pauvre, il n’est pas au courant du récent coup de calgon à cause que la Grèce et l’Espagne font n’importe quoi mais chut : restons dans le sujet, le terre-à-terre, la dette, tout ça machin bidule ça donne des migraines à Jean-François qui fait dans le plan de campagne (électorale) et pas dans le pâté (de campagne – suivez un peu).
Si l’on omet donc le dollar faible, le message est limpide : il faut plus de femmes aux Conseils d’Administrations des entreprises parce qu’il faut travailler mieux. La terre est ronde, n’s’pa. M’suivez ?
Et concrètement, mon petit Jean-François, tout ceci donne quoi ? Eh bien c’est très très simple, limpide comme tout le projet, du reste :
Si le quota de femmes n’est pas atteint, nous proposons de considérer comme nulles l’élection de tous les nouveaux membres hommes ainsi que les délibérations auxquelles ces derniers auraient pris part.
Vous voyez ? Si ces cons de patrons ne se plient pas rapidement à la loi, on va intervenir directement dans les conseils d’administration d’une propriété privée histoire de foutre un peu notre grain de sel. Pourquoi ?
Ayez confiance.
Parce qu’on peut, tiens, c’te bonne blague ! On peut même déposséder le con de patron misogyne de sa boîte, tiens. Et puis on peut aussi le jeter dans une geôle froide, pour faire bonne mesure. Ah ah, la terre est plate, hein ? On rigole moins, dans sa petite cellule froide, hein ?! …
Mmmh je crois que Mini-Lui s’emporte un tantinet. La fin de l’interview, heureusement, calme un peu le jeu (un peu). On apprend en effet que Jean-François s’est mêlé des affaires des femmes depuis un moment :
mon mandat de maire de Meaux m’a amené à prendre conscience sur le terrain d’un certain nombre de sujets graves, qui vont de la femme qui se retrouve seule, avec le RMI et trois enfants, aux violences conjugales, en passant par les comportements pseudo-religieux inacceptables.
Il est à noter que les femmes seules avec trois enfants au RMI et qui entrent dans un conseil d’administration ne sont pas légions. Grâce à lui, ça changer, z’allez voir ! Mais c’est surtout la fin qui vaut son pesant de chocolat :
Pensez-vous que le prochain président de la République sera une femme ?
Je l’ignore, mais toutes les conditions sont rassemblées pour qu’une candidate puisse le devenir.
Ça claque, de la part de quelqu’un qui fera tout pour que justement, ce ne soit pas une femme qui arrive au pouvoir, mais lui.
Vous ne trouvez pas ?
Ah, évidemment ! Si les hommes et les femmes n’ont pas les mêmes carrières, c’est nécessairement parce qu’il y a un traitement inégalitaire quelque part… Il ne viendrait pas à l’idée de la plupart des français que si les femmes n’ont pas les mêmes carrières que les hommes, c’est peut-être tout simplement parce qu’elles n’ont pas envie d’avoir les mêmes carrières. Non, c’est nécessairement parce qu’il y a de vilains patrons machistes qui les empêchent de s’épanouir professionnellement.
Or, il est amusant d’observer ce qu’il se passe dans les organisations qui ont mis en place des règles de gestion des carrières parfaitement égalitaires. Prenez par exemple les enseignants. Là, pas de vilains patrons machistes pour bloquer les déroulements de carrière des femmes puisque, à tous les niveaux, la sélection se fait par concours. Or, si l’on constate qu’il y a beaucoup plus d’enseignantes certifiées, on observe une certaine parité homme/femme au niveau des agrégés, et un renversement de tendance à l’université avec plus d’hommes chez les maîtres de conférences et, enfin, une écrasante majorité de mâles chez les profs d’université.
De même, à l’université, les postes de direction (directeur de fac, de labo de recherche, présidence d’université, etc.) sont électifs. Et on observe, là aussi, une écrasante majorité d’hommes à ces postes.
Enfin, troisième exemple que je connais bien : prenez la filière de formation universitaire aux métiers de la finance-comptabilité. Puisqu’il s’agit d’une filière sélective et que les résultats scolaires des filles sont meilleurs, on devrait donc en toute logique les voir truster les niveaux de formation les plus élevés. Et bien là aussi, mêmes constats : à bac+2 (DUT), il y a environ 70% d’étudiantes ; au niveau de la licence, la proportion homme/femme s’équilibre ; en Master, il y a nettement plus d’hommes.
Copé relève le niveau d’une classe politique dont les comiques de service habituels se font discrets ces derniers temps 🙂
>:(
Sur le même sujet, en mode appeau à troll (et en anglais). Même sur un ste US on constatera que le point de vue social-démocrate est bien représenté.
http://news.slashdot.org/article.pl?sid=10/02/07/1555254
Désolé d’être chiant après un post si drole, mais… Je signale à ce sujet les travaux de Thomas Sowell dans un de ses derniers livres (ça s’appelle qqch comme « economic myths and fallacies »), ou il développe, résultats de recherche à l ‘appui, la théorie suivante:
la moindre progression de carrière des femmes résulte d’un choix plus ou moins réfléchi de répartition des rôles dans les couples dits « carriéristes »: en gros, le mec accepte de se défoncer 10-12h/ jour pour que madame puisse dépenser l’argent gagné en s’occupant des mômes. En libérant Monsieur de ces basses contingences, on augmente la probabilité de premettre à monsieur d’entrer dans le C-level management, celui qui gagne des gros cadeaux bonux, ce qui est financièrement bien plus rentable que d’être à deux au niveau immédiatement en dessous.
a contrario: les femmes qui ne se sont jamais mariées et n’ont jamais eu d’enfant, à diplome égal, ont une progression de carrière à peu près identique à celle des hommes, en moyenne. Mais comme ce profil est rare, évidemment, ça fait peu de femmes au sommet. D’ou les revendications égalitaristes…
pas pu vérifier si c’est exact, mais ça se tient.
(D’ailleurs, j’aimerai bien qu’on me dise qui dépense la plus grosse fraction de l’argent gagné dans un couple. Car enfin, le salaire, c’est les emmerdements, mais la dépense, c’est le plaisir qui en découle, non ?)
En tout cas, Sowell aura pas de visa de copé pour venir en France, avec des théories pareilles.
Cher Hashtable.
superbe votre tirade contre ce fléo de la parité.
J’aurais bien eu votre style d’écriture mais en tant que travailleur immigré « avec papier » je me contente de quelques écrites simpliste en rédaction , voire nomdundieu.com qui aborde aussi ce sujet
Comme je disait il y a dernièrement, cherie je suis d’accord on commence ce soir.
dans le même régistre la démocratie dans les entreprises.
Tout cela prend effect en 1948 avec les droit pour les femmes à l’élection.
Pas étonnant que un couple sur deux divorse, que nos juges sont des femmes ou l’école .
la nature prendra ces droits et dans quelques decenies elles auront une voile sur la tronche. et marcheront derrière l’homme dans les rues.
j’ai adoré la photo de votre amie Copé, comme aurait dit Freche pas un tête très catholique.
je vais le mettre dans mes archives.
gnéééé ?
Un onomatopé pas très explicite.
les hominides ont une language.
Il y a quelques jours dans le JT de TF1 était présente le déséquilibre injuste h/F dans les conseils d’administration des grandes entreprises. De mémoire il y avait Total, Areva et SNCF comme exemples.
Chez tous c’était très déséquilibré, mais devinez chez qui c’était le pire du pire?
A part ça pourquoi 40 % de femmes et pas 50 tout simplement (mais aussi pour les ministres, les élus, pour toutes les administrations et toutes les entreprises et ce pour tous les postes) ? C’est dingue, pour corriger une « inégalité » l’Etat va la figer dans la Loi!
Ah lala, ce Copé : Mini-Lui mais méga bouffon.
Ce serait marrant de voir combien d’anciens fonctionnaires trustent les fameux conseils d’administration incriminés.
« Vous voyez cet homme qui travaille 5 jours, et cette femme qui travaille 4 jours ? Eh bien ils sont efficaces pareil. Alors on va les payer pareil et l’homme, quand il dira “mécédégueulasse, je dois travailler 5 jours pour avoir autant qu’elle”, on va lui répondre qu’il ne comprend rien de rien et que la Terre n’est pas plate. Con d’homme. »
Normal, les femmes sont mieux organisées que les hommes. C’est pourquoi elles font en quatre jours ce que les hommes font en cinq, et vont faire les magasins le mercredi.
Au fait, pas de quotas de travestis et transsexuels dans les conseils d’administration ?
On y viendra avec un peu de zèle de la part d’esprits aussi brillants que Jean-François 🙂
Et il faudra bien entendu des quota de trans obèse, black/beur etc, male to female, female to male, le tout décliné entre les différentes combinaisons pour être bien certains que personne ne se sente victime de discrimination au pays de la fraternitude et de l’égalitude.
Z’êtes sexistes, vous, à dire que les hommes sont des glandeurs désorganisés ! Et l’égalité homme-femme, alors ? Et effectivement, il faudrait des quotas de Trans/Bi/Gay/Lesbiennes dans les Conseils d’Administration. Ça aurait de la gueule, tiens, Areva ou Thales dirigé par un(e) trans !
Je trouve ca mou.
Il serait temps d’avancer un peu sur le terrain de l’implantation d’embryon dans le ventre des hommes ca aurait tout de meme plus de gueule comme projet. Et puis ca creerait des emplois evidemment.
Je trouve le concept de sélection d’un candidat totalement dépassé, regardez, on en est encore à la guéguerre homme-femme.
Et que dire des innombrables discriminations professionnelles, liées à la formation ou à l’ignorance d’un poste à pourvoir par les éventuels candidats? Et l’éternel dilemme « pas d’expérience sans embauche, pas d’embauche sans expérience »?
C’est trèzinjuste.
LA Solution: dès qu’un poste devient disponible, il devrait revenir à un individu tiré au sort par l’Administration. Ainsi, l’Administration planifiera l’égalité des chances de tout un chacun, l’accès à des postes à responsabilité par des chômeurs de longue durée, la parité homme/femme/transsexuel dans les conseils d’administration! Alléluia!
PS: Quant aux tristes sires qui pensent qu’on ne peut pas mettre n’importe qui à n’importe quel poste je les invite à revoir « Un fauteuil pour deux » avec Eddie Murphy (1983), dans le cadre d’un programme de rééducation par la HALDE.
Excellente idée. Le LOTONPE (loto national pour l’emploi), c’est une vraie idée d’avenir.
« LA Solution: dès qu’un poste devient disponible, il devrait revenir à un individu tiré au sort par l’Administration. » : c’est pas comme ça qu’ils faisaient à Venise pour se choisir un Doge ? Il me semble aussi que ses biens étaient gelés pour éviter qu’il tire un profit personnel de son poste. Pas étonnant que les candidats ne se bousculassent pas.