Imprime ton gun, camarade !

Cette semaine aura vu naître, au milieu des bourrasques financières, une vraie bonne grosse polémique lancée sans talent par Jean-François Copé : instaurer auprès des jeunes Français un serment d’«allégeance aux armes», histoire de faire du vrai citoyen frémissant d’envie d’aller mourir pour la nation dans une guerre à l’autre bout de la planète pour un baril ou deux. L’idée a déclenché un tollé…

Sans grand mal d’ailleurs, on peut s’imaginer que les socialistes se sont emparés de la nouvelle avec effroi en hurlant au retour des heures les plus sombres de notre histoire avec des morceaux de Maréchal Pétain dedans. Même à droite, l’enthousiasme fut particulièrement parcimonieux.

Pourtant, il n’aurait pas fallu grand-chose pour transformer l’idée de Copé, mal boutiquée et très orientée idéologiquement, en un véritable succès citoyen. Par exemple, cet appel aux armes aurait pu être l’occasion de la distribution, comme en Suisse, d’une excellente arme militaire de réserve, à entretenir pieusement. Mais en France, ce concept de citoyen armé est quelque chose qui hérisse les collectivistes et les partisan du Tout Etat : difficile de prendre le pouvoir et de faire faire ce qu’on veut à une population lorsqu’elle est armée et indépendante d’esprit…

Or, avoir, prochainement, une population citoyenne de plus en plus armée et indépendant est, quoi qu’on en pense, de plus en plus probable : disposer d’armes effectives et puissantes ne sera bientôt plus qu’à quelques clics de souris.

En effet, j’ai déjà évoqué il y a quelques billets de cela la technologie d’impression en 3D : à partir d’un modèle en trois dimensions réalisé sur un logiciel adéquat (3DS, Maya, …) une machine outil va réaliser l’objet par dépôt de couches successives très fines dans un polymère qui va durcir au contact de l’air ou, pour certains modèles, par exposition à des ultra-violets, par oxydation, etc…

Pour le moment, les gouvernements (et les clowns à roulettes à la sauce Copé qui les dirigent) n’ont même pas entendu parler de ces technologies et s’en foutent comme des aspirations de leurs citoyens à une vie aussi loin d’eux que possible. On est, au sujet de ces technologies, exactement au même point que lorsque l’Institut Fraunhofer commença à distribuer ses algorithmes d’encodage et de décodage musical qui permirent l’explosion du format MP3 et, parallèlement, l’échange musical massif : le rythme de pénétration de ces technologies fut bien plus grand que celui auquel le législateur put réagir. Il fallut attendre plus de 10 ans avant que les premières agitations répressives spécialement destinées à lutter contre les contrefaçons numériques apparaissent. Et lorsque les institutions (plus ou moins bidon) style HADOPI apparurent, la copie numérique était déjà entrée dans les mœurs.

Avec l’impression 3D, on se retrouve avec une technologie disruptive massive qui va permettre à beaucoup de disposer, chez soi, de pièces faites à-façon sans passer par les étapes complexes d’un usinage dans des ateliers spécialisés.

Si l’on ajoute à cela qu’apparaissent actuellement des technologies permettant l’impression 3D de pièces en métal, on comprend qu’il va devenir possible … d’imprimer des armes à feu. Certes, pour le moment, il sera recommandé d’usiner de façon traditionnelle les quelques pièces (canon, chambre) qui subissent directement les pressions les plus fortes, mais déjà apparaissent, dans le milieu pour le moment confidentiel de l’impression 3D, des débats sur l’impression d’armes.

1911 stainless

On comprend tout de suite que le changement introduit par ces technologies, ici, n’est pas un changement sur le lieu ou la capacité à produire son arme soi-même : après tout, il existe sur internet des plans détaillés de certaines armes automatiques ou semi-automatiques, et réaliser, avec suffisamment de patience et pas mal de savoir-faire, de telles armes, n’est pas rigoureusement impossible.

En réalité, ce qui compte ici est le saut énorme de facilité introduit par cette technologie : il devient beaucoup plus facile d’imprimer une clef à molette, un écrou, une serrure de porte, ou des pièces d’armes dans des proportions suffisamment grandes pour que cela soit accessible au père de famille à partir de son bureau, et sans faire intervenir un nombre élevé d’intermédiaires, voire aucun lorsque les imprimantes 3D seront vraiment accessibles au commun des mortels.

La question qui se pose alors est de savoir comment réagiront les autorités des pays les plus centralisés, ceux qui ont toujours considéré leurs citoyens comme une plaie qu’il faut supporter, un mal qu’il faut canaliser, et dont la responsabilité ne dépasse pas celle qu’on peut attendre d’un gamin de 5 ans…

Il y a fort à parier qu’on verra apparaître des instances inutiles et dépensières dans la même veine que la HADOPI qui s’empresseront de frapper du sceau de l’interdit les plans de ces armes, de poursuivre les citoyens qui auront l’impudence de vouloir s’armer.

Et si la réflexion vaut pour les armes, elle n’en sera bien évidemment que plus vraie sur l’ensemble de toutes les pièces et autres éléments dont on peut avoir besoin dans une vie de tous les jours : on imagine déjà le tsunami de corporatistes qui viendront pleurnicher à chaudes larmes auprès des députés pour qu’ils protègent leur pré carré ; les épisodes grotesques des tractations entre les lobbies musicaux et le parlement, ces dix dernières années, donnent un bon aperçu de ce que seront ces batailles qui s’annoncent homériques.

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Commentaires30

  1. Pascale

    Je ne comprends pas bien de quoi il s’agit : il serait possible de fabriquer de véritables armes avec une imprimante 3D ????
    De toute façon elles seront toujours interdites par la loi.

    1. Stéphane

      Oui mais pour tracer qui possède quoi, bonjour.

      (remarquez, actuellement, vu l’étendue des zones de non-droit dans lesquelles les policiers français n’osent même plus se rendre fussent-ils un régiment entier, niveau traçabilité, il doit y avoir quelques soucis, comme en témoignent les arsenaux régulièrement découverts ici ou là ou les AK.47 désormais utilisés dans des braquages.)

      Ceci dit, il reste encore du boulot avant que la résine ou autre substance utilisée par une imprimante 3D ait une résistance suffisante pour créer une arme réellement fonctionnelle. Pour celui qui veut menacer, ça ira, pour qui veut tirer, il y a encore un bout de chemin à faire…

        1. Glam

          il faut cependant souligner que les armes comme le AK et le 1911 sont tres faciles a (re)produire.Le probleme de l’impression sera dans la resistance du materiau.

    2. Martin Lothar

      « De toute façon elles seront toujours interdites par la loi. » Vous savez Pascale qu’une loi n’est jamais que l’expression de la volonté du plus fort. Ça se change aussi vite que quatre roues d’une voiture de course F1 (moins de trente secondes) ou encore qu’un préservatif ; que l’on soit éjaculateur précoce, ou pas.

  2. Obsédé Textuel

    Je salue le niveau d’imagination de l’auteur de cet article, cependant, si on veut vraiment acquérir une arme à feu ce n’est pas bien difficile.

    Il suffit de se faire livrer des pièces détachées. Ou bien il existe des armes de chasse très performantes et largement suffisantes pour l’auto défense citoyenne !

    En outre ceux qui voyagent un peu ne manquent pas de témoignages de propositions d’une arme livrée chez soit par un livreur, bien sous tous rapports !

    1. Bien sûr. Mais comme je le souligne à la fin de l’article, c’est la facilité d’obtention et le nombre des gens potentiellement intéressés qui changent avec cette techno 🙂

  3. style

    Pour la carcasse du colt en illustration,il s’agit dune réplique factice airsoft a l’échelle 1,et pas d’une vrai arme.

  4. Glam

    ‘histoire de faire du vrai citoyen frémissant d’envie d’aller mourir pour la nation dans une guerre à l’autre bout de la planète pour un baril ou deux’

    et encore: le but militaire dans certains cas comme la vallee du Korengal en ce moment est clairement et uniquement le controle de la region par des instances etatiques.Le cote ‘sexy’ de l’etat etant dans ce cas sa capacite a installer des infrastructures civiles.

  5. Stéphane

    Je crois qu’il est déjà plus facile de se procurer une arme que d’en imprimer une.

    Au train où vont les choses, même en tenant compte de la baisse de prix des imprimantes 3D, je doute que cela change. Le marché noir des armes est lui aussi en plein boom en France.

    1. Si vous parlez des gens que la loi n’effraie pas, oui. D’ailleurs, les contrefacteurs de CD physiques étaient peu nombreux avant le MP3. Si vous parlez des autres, que la loi refroidit, …

  6. grosben

    Sûr que pour copier une arme actuelle, l’impression 3D c’est pas le top. Par contre il y a surement moyen d’inventer un truc qui fait bien mal mais facile à fabriquer avec cette technologie et de publier les plans pour que d’autres l’améliore encore et encore…

    Outre l’impression 3D internet apporte plein de nouvelles possibilités pour fabriquer des armes:
    – il y a une boite anglaise d’usinage qui propose son propre logiciel de CAO, tu dessines ta pièce avec, ça t’affiche le prix, tu sors la CB et tu commandes. Personne te demande c’est pour quoi faire.
    – Avec batchPCB tu peux faire fabriquer des circuits imprimés pour que dalle, tu utilises des DSP microchip qui ne nécessite qu’un investissement de 20$ en outil de programmation et du moment qu’un bon a publié des schémas et des codes sources sur le net, tu peux potentiellement te fabriquer des talkies walkies cryptés, du matériel de détection d’écoute, des détonateurs qui explosent quand il entendent le bruit des bottes réglementaires ou que sais-je encore.

    Pour l’anecdote des rebelles libyens ont tenté d’utiliser un hélico radiocommandé muni d’une caméra pour s’en servir comme drone. Dans un pays moderne ça m’étonnerait pas que des types doués puissent fabriquer l’équivalent d’un bon vieux Stinger apte à descendre des hélicos de combats.
    Je suis d’accord plus va le progrès plus il sera difficile aux gouvernements de mener une lutte armée contre la population. L’équipement du fantassin n’a pas évolué depuis bien longtemps, celui du peuple si.

    PS: ça me fait penser au ridicule Famas Félin, une daube obsolète dès sa sortie qui pèse un âne mort et qui semble pas faire grand chose de plus qu’un smartphone.

    1. D.E man

      C’est d’ailleurs pour ça que les américains ont renoncés à l’OICW(mélange entre une M4 et un lance grenade 40mm)

    2. adnstep

      « Dans un pays moderne ça m’étonnerait pas que des types doués puissent fabriquer l’équivalent d’un bon vieux Stinger apte à descendre des hélicos de combat. » : Durant les sorties nocturnes quotidiennes des hélicos de l’ALAT depuis juin en Libye, aucun appareil n’a été abattu, malgré que les Libyens aient des SA-7 ou des canons de 23 mm ou de 14,5 mm.

      Quand aux aéronefs et aux drones, ils n’ont pas eu non plus à subir de pertes malgré les tirs des missiles libyens.

      Bref, c’est assez facile de toucher une cible qui ne s’y attend pas, beaucoup plus difficile de toucher des gars entraînés et sur leurs gardes.

      En passant, 62% des Français sont favorables à la proposition de l’UMP d’instaurer un « serment d’allégeance aux armes », selon un sondage Ifop pour France-Soir.
      Cette proposition s’inspire du serment d’allégeance au drapeau (Pledge of Allegiance) américain, instauré en 1942.

  7. Alex6

    Pour le coup, bof. On parvient difficilement a produire un equivalent plastique qui ne casse pas apres deux manip’ en prototypage et ca coute encore un pont (machine 3D inclus)
    Quand a fabriquer son arme soi-meme, mieux vaut bien s’y connaitre et maitriser les techniques d’usinage sinon aucune chance d’en tirer quoique ce soit.
    Il y a clairement un avenir a l’impression 3D, comme d’un point de vue commercial en support de vente pour pouvoir essayer l’objet physique mais de la a creer de vraies pieces fonctionnelles, ca me surprendrait de voir ca de mon vivant.

  8. Scaletrans

    Le frettage des fûts, les traitements thermiques et chimiques sont hors du domaine de l’usinage 3D.
    Sinon, puisqu’on évoque les guerres lointaines, voici une petite comparaison:
    Pertes sur 10 ans en Afghanistan: 75
    Pertes en Indochine:
    Septembre à fin 1945 367 tués ou disparus

    1946 2828

    1947 4081

    1948 4821

    1949 4872

    1950 7150

    1951 3443

    Il y en aura beaucoup d’autres après, dont un certain nombre par le sieur Boudarel qui mourut dans son lit après une paisible retraite d’universitaire dans notre beau pays.

  9. No_name

    Petite blague de milicien suisse:
    Connaissez-vous la différence entre un citoyen et un contribuable ? Un fusil !

    1. gem

      +1
      Depuis 1500 et des poussières, quand les armes à feu commencent à se diffuser, le progrès principal réside dans les munitions

  10. Z

    Tiens, l’impression 3D, un sujet qui m’intéresse beaucoup, de même que tout le mouvement des FabLab.

    Avec mon ami ce WE, nous regardions une jolie carafe où nous avions versé un excellent vin, et nous nous disions que probablement dans quelques années, on ira sur Wikipédia, on lira l’article « carafe » et de la même manière qu’on a actuellement des illustrations de carafe, on cliquera sur un lien et on aura un choix de plans sous licence libre pour « imprimer » nos carafes nous-mêmes…

    Et j’essaie d’imaginer le bouleversement économique que ce type de fabrication va induire. J’avoue que pour l’instant j’arrive à imaginer la chose en tant que mode de production alternatif (et de fait ces technos sont pour l’instant assez alternatives), mais beaucoup plus difficilement pour une production individuelle massive. C’est vrai que l’exemple des armes est tout à fait emblématique : que devient la régulation traditionnelle (à laquelle je ne suis pas spécialement attachée) face à une production locale, décentralisée et individuelle ? Où se situe le commerce ? Quid du maeltröm réglementaro-sécuritaire dans lequel nous sommes enserrés ? Quitterait-on un modèle industriel pour revenir à un modèle artisanal, où chacun est son propre artisan ?

    Instinctivement je plaque des références issues d’économies anciennes, du troc ou d’échanges monétaires locaux, du type médiéval avant le développement de la banque. De l’époque où tout le mobilier de base était produit à la maison ou destiné à un marché d’échange très limité géographiquement. Et ça me rapproche des monnaies locales qui fleurissent actuellement (et pour lesquelles j’apprécierais votre analyse !)

    Bref, plein de bouleversements et tellement fondamentaux que j’ai bien du mal à y voir clair, même si instinctivement cette réappropriation de la production par l’individu a plutôt tendance à me plaire.

  11. gnarf

    Pas gagne… probleme de resistance du materiau et de precision de l’impression.

    La pression encaissee par l’acier d’une arme est assez colossale….et quand on sait qu’une arme qui eclate blesse ou tue son proprietaire je pense que les gens prefereront encore les armes classiques bien apres que la techno soit mure.

    1. Ce qu’il faut comprendre de l’article, c’est que ces aspects purement techniques seront résolus, en temps et en heure (parce que rien, techniquement, ne l’en empêche à présent) : il existe déjà des céramiques qui supportent bien les pressions concernées. Elles ne sont pas encore disponibles pour les imprimantes 3D, mais le seront un jour.

  12. breizh06

    Je crois bien me souvenir qu’aujourd’hui, la possession d’un tour pour usiner un tube, est soumis à autorisation de la Préfecture.

    Les machines de rechargement de cartouches sont en vente libre, la poudre et le plomb aussi.

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