Je ne sais pas quand vous pourrez lire ce billet, mais il a été écrit dimanche matin, alors que j’émergeais lentement d’une nuitée un peu trop courte. Deux raisons expliquent cette première phrase : il n’y a plus internet dans tout le quartier. Gageons que l’un ou l’autre technicien de France Télécom aura raté son suicide en se pendant à une ligne ATM qui aura brutalement cédé sous son poids. Ça explique la raison du postage en retard. Et pour la partie nuitée courte, je me suis couché tard et comme je n’ai plus vingt ans, les décalages horaires ne me réussissent plus trop.
Mais l’occasion en valait le coup : j’ai eu l’opportunité de rencontrer, dans le cadre d’une réunion de l’association Libéraux.org, quelques uns de ces terribles capitalistes qui mangent du bébé communiste comme d’autres les cacahouètes à l’appéritif. Rassurez-vous, la liste des présents a été transmise aux RG comme il se doit.
Ainsi donc, pendant les quelques heures qu’aura duré cette réunion, j’ai pu oublier les pitreries répétitives de Sarkozy. Entre libéraux, nous n’avons pas de temps à perdre à parler du socialiste honteux qui se cache derrière une politique de strass et de paillettes pour faire avancer un agenda foutraque d’état sécuritaire en carton, et nous avons planifié la suite des opérations que nous menons tous les jours pour spolier les pauvres, voler la veuve et faire pleurer l’orpheline. Et manger de la salade de fruit.
Nous avons aussi pu constater que l’actualité en France est, surtout ces derniers jours, particulièrement focalisée sur un nombre extrêmement restreint d’éléments qui font qu’objectivement, le blogueur, consciencieux de se renouveler, a bien du mal à produire régulièrement de la matière à réflexion.
Ici, je pourrais certes parler cuisine : on est dimanche, et c’est généralement propice à des préparations culinaires hardies. En plus, ce blog est souvent l’occasion pour moi de parler crêpes au sucre, confiture de groseilles et coulis de moraline. Et puis la politique française ressemble par trop à de la tambouille pour que le pont naturel entre mes expériences chimico-gustatives et les recettes politiciennes ne soit pas tenté régulièrement.
Il n’en reste pas moins que l’attention politique, en France, semble facilement happée par quelques éléments et qu’il soit de plus en plus difficile de voir émerger de vrais débats de fond dans l’actualité.
Il y a toujours la possibilité, pour rire, d’aller commenter une de ces fadaises ridicules pondue par un Laurent Joffrin en mal de polémique, ou d’éplucher un de ces articles écologiques des pages Planète ou Nature ou je ne sais quelle merdasse verdoyante proposée par nos quotidiens au sujet de l’écologie, au potentiel nanardesque jamais épuisé.
Cependant, pour le fond, le vrai débat, celui qui nécessite de l’argumentaire finement ciselé et un minimum d’une ceinture noire 3ème dan de rhétorique, c’est – passez moi l’expression triviale – peau de zob dans les médias. Régulièrement, la blogosphère permet de faire émerger quelques sujets croustillants et, une ou deux fois par mois, et souvent sur un malentendu, un débat crépitant émerge. Ici, je pourrai par exemple linker sur l’un ou l’autre : c’est bon pour le ranking wikio (dit-on), ça permet de mettre en valeur des articles de réflexion, bien tournés, ou rigolos (il est bon de rire parfois).
Mais le constat général subsiste : la présence de deux blocs politiques majeurs et distincts en France ne garantit en rien l’apparition d’une dialectique, ou d’un échange de points de vue musclés sur des directions différentes que la France pourrait prendre.
J’entends déjà certains grogner, dans le fond. Si si, ne vous cachez pas, je sais que mes collègues de la gauchosphère maugréeront, ceux de la centrosphère se renfrogneront et ceux de la droitosphère piafferont.
Pourtant, regardez les choses en face.
Sur ma gauche, c’est le désastre. Le parti socialiste n’est même plus l’ombre qu’il était devenu en 2002 à la suite de la mémorable branlée jospino-chiraquienne qu’il s’était autoadministrée dans un geste auguste de surestimation catastrophique. Depuis, entre une Aubry marquée essentiellement par une absence soigneuse de toute direction, une Royal dont les seuls faits d’arme, sur les trois derniers mois, auront été de pondre l’un des plus gros bad-buzz internet à ce jour, et un nombre conséquent de second couteaux aux discours contradictoires, hétéroclites et confus, le réceptacle naturel des votants du Camp Du Bien n’offre aucune opposition de fond. Ça couine, ça grince, ça bricole, … mais ça ne s’oppose pas des masses : dans le fond, les socialistes restent fermement campés sur leurs positions de base : coller des impôts vexatoires aux riches, dépenser toujours plus dans le social, et crier à la dictature fasciste quand Sarkozy se gratte le nez.
Sur ma droite, les murs se lézardent et les moulures lambrissées dégringolent. Soyons clair : le député moyen de l’UMP a de plus en plus le sentiment de servir de potiche à un gouvernement lui-même croupion d’un président qu’il est de plus en plus difficile de contrôler et dont les excès sont de plus en plus visible au point de reléguer l’iceberg qui coula jadis le Titanic au rang de boule de neige sale d’une cour de maternelle.
Être la potiche d’un croupion, même à 5000 euros par mois, c’est progressivement de plus en plus dur surtout lorsque le job consiste en plus à avaler des couleuvres dont le diamètre les rapproche dangereusement de boas constrictors. Ca grogne donc aussi, mais comme dans la majorité, l’opposition n’est (évidemment) pas de mise, le discours ambiant n’égratigne que la forme. Et sur le fond, la droite mise maintenant sur l’augmentation des taxes, le saupoudrage social généreux, et des mesures qui, il y a trente ans, les auraient classés résolument chez les radicaux socialistes.
En France, nous avons aussi un centre. C’est un mélange habile des socialistes de gauche qui veulent plus d’impôts et des corporatistes de droite qui veulent plus de taxes. Pour faire bonne mesure, Bayrou se gratte le nez (personne ne crie au fascisme, pour le coup) et se préoccupe vaguement de la dette. Mais, là encore, l’opposition est une opposition de pure forme.
… Puisque dans le fond, tout le monde s’accorde sur un point :
Il n’y a plus un rond, il va falloir en trouver. Et comme diminuer drastiquement les dépenses (dans le social, l’administration, l’éducation, la justice, l’armée, etc…) est impensable, il ne reste plus qu’une idée, lumineuse pour tous ces sociaux-démocrates : augmenter les impôts, les taxes et les ponctions.
Moyennant quoi, le débat se déplace sur le népotisme (important, mais finalement de peu d’impact sur la vie politique en France), sur les quéquettes de ministres, leur humour douteux ou les rattrapages gluants de l’extrême-droite ou de l’extrême-gauche.
Pendant ce temps, le pouvoir d’achat s’est mué en désir d’en avoir un dans l’avenir, et si l’on travaille plus, c’est pour payer plus d’impôts.
Constat d’un n-ième échec de la politique socialiste en France…
Bonjour Sieur H16,
le plus magnifique reste le fait que les bien-penseurs de la gauche (en réalité tout ceux qui ont un droit de parole dans les médias), au prix d’une connaissance parfaite du dictionnaire et des lois économiques, parviennent à définir la politique de la France comme terriblement « ultra-libérale ».
Pis encore, tout le monde, du journaliste non-scrupuleux au chroniqueur faussement énervé en passant par le quidam de la rue, celui avec le béret et la baguette, reprend la définition, taxant (c’est devenu un réflexe : même concernant des idées et définitions, ils taxent !) le gouvernement d’être à la solde des vilains patrons qui ne sont pas gentils et de mettre en place une ignoble politique ultra-libérale.
A les écouter, si l’équipe de France de football ne se qualifie pas pour le Mondial 2010, ce serait à cause d’une tactique ultra-libérale.
Un correctif : sur la fiscalité, la position globale du MoDem, c’est des taxations plus légères que ce qu’il ne se fait, mais ni niches ni exemptions.
I stand corrected. Le résultat fait tout de même que les revenus de l’état augmentent.
Ce qui m’étonne toujours, c’est d’écouter les gauchistes invités en permanence sur les médias français nous expliquer que tous nos malheurs viendraient de l’ultralibéralisme (parce que vous l’avez remarqué, le libéralisme est toujours ultra…) sans avoir jamais aucun libéral en face pour les contredire. Faut-il que les (ultra)libéraux de ce pays soient puissants et discrets pour arriver à nous maintenir silencieusement dans un tel merdier malgré toutes ces forces « progressistes » de gauche qui tentent de nous apporter le bonheur d’une façon si tapageuse.
La photo est fabuleuse 🙂
Encore une analyse très juste mais qui reflète l’impuissance à se sortir d’une telle situation.
J’entends souvent dire moi aussi que la solution est de ponctionner « les riches » à des taux confiscatoires, de l’ordre de 80% par exemple pour certains humanistes modérés comme Piketty.
Notez, sur le papier la solution a de la gueule : non seulement grâce à l’argent « des riches » on équilibrera les budgets, mais en plus si ça continue à merdoyer, ce sera la faute des autres pays qui appliquent une concurrence fiscale déloyale.
Mais ce que je ne comprends pas, c’est comment ces économistes-miracle de tout bord s’imaginent faire rester les fonds dans le pays en appliquant un taux de prélèvement qui tutoie le racket. Je veux dire, concrètement, quelle serait la méthode employée?
On surveille toutes les transactions financières de France grâce à un accord bilatéral avec les Etats-Unis pour utiliser le réseau ECHELON à cet effet? Et le premier qui fraude, couic?
On joue sur la culpabilisation? C’est mal, Camarade assujetti à l’ISF, d’envoyer tes fonds hors de nostre douce France. Donne-les pour la grandeur du Parti et du pays. Et si tu refuses, on reviendra aux bons vieux lynchages publics.
On assomme les pays du G20 (et les autres) qui ont le tort d’être moins socialistes que nous jusqu’à ce que les fonds français à l’étranger soient systématiquement rejetés vers leur pays d’origine?
Que quelqu’un m’éclaire, de grâce. Ces grands pragmatiques y ont forcément pensé.
Etant moi même un dangereux socialiste, je me permets de rappeler à l’auguste assemblée ici réunie semble t-il (et plus particulièrement Evan) que le financement de l’économie passe de façon plus qu’accessoire par l’intervention de « fonds ». S’ils déséquilibrent allègrement les grosses sociétés et imposent à des CA compatissants des ROI démentiels, la majeure partie de l’investissement en France est faite par votre bon vieux banquier (94% en des Inv sont financés par l’emprunt en 2006 derniers chiffres dont je dispose).
Il semblerait de plus que cela ne soit pas si confiscatoire que cela puisque malgré la perspective de travailler 6 mois pour l’Etat (oops non j’avais oublié que la CSG et le CRDS ne sont plus dans l’assiette des bénéficiaires du « bouclier », 39% donc) la France est récipiendaire du 3ème montant mondial des IDE.. il doit bien y avoir une raison (au sens premier du terme), non?
Je crois que tu te méprends sur le sens donné à « fonds » chez Evan. Ce qu’il dit est plus simple et pragmatique : si l’on taxe très fort les riches, ceux-ci partent. Et si la France est 3ème récipiendaire mondial, c’est précisément parce que tout le monde a compris qu’il ne fallait pas trop cogner sur ceux qui arrivent avec les poches pleines. Cette mentalité évolue, et il est probable que cette place (qui tient aussi à d’autres facteurs, notamment géographiques et démographiques) s’effrite très vite.
Mais à la limite, je répondrai globalement : vous (les socialistes, disons) voulez sodomiser du riche et prétendre faire de la redistribution ? Allez-y. Lâchez-vous. La totale : taxe carbone, taxe Tobin, ISF de folie, go ! Je prends des photos, de loin, et on en reparle dans 5 ans. Pour rire.
Je crois que le flux d’argent des francais investi à l’ètranger est supérieur a l’IDE en France
L’argent fuit donc…
> Nous avons aussi pu constater que l’actualité en France >est, surtout ces derniers jours, particulièrement >focalisée sur un nombre extrêmement restreint d’éléments
L’election de David Douillet à Poissy, par exemple ?
Douillet passe au 2è tour avec 52%.Pour un siège monopolisé par la (fausse) droite depuis 20 ans,pas de quoi pavoiser.
> Douillet passe au 2è tour avec 52%.
Ah bon, parce que Sarkozy était passé au premier tour en 2007 ?
Moi j’y vois surtout de la stabilité dans l(opinion publique, qui conforte l’UMP.
Oh là, maurice, pas si vite ! Comparer la 12ème circo des Yvelines à l’Opinion, c’est osé. Moi, j’ai tendance à penser que les votants ont surtout montré, pour quelques uns d’entre eux, qu’ils étaient vaguement au courant que Douillet le judoka était candidat, pas Douillet le chiraquien Ump…
@clk500: la réalité est un peu plus complexe me semble t-il dans la mesure où est aussi considéré comme un IDE un investissement >15% du capital d’une ents (en dessous investissement dit de portefeuille), donc les stratégie de prise de capital à l’étranger pour des raisons stratégiques sont incluses ds ces calculs…