Ca y est. Le petit Nicolas va récupérer les clefs du Palais, et jeter son vieil occupant précédent dehors. Pendant qu’il se dore les fesses à Malte aux frais de Bolloré, le pays va pouvoir se remettre de son élection et commencer à réfléchir sur ce qui l’attend vraiment dans les prochaines semaines…

Et pour fournir une réflexion, on pourra avec bonheur utiliser les matériaux que le nouveau président nous aura lui-même fourni ; en l’espèce, son discours au soir de la victoire donne déjà quelques pistes.

Ainsi déclare-t-il :

« Le peuple français a choisi le changement. Ce changement je le mettrai en oeuvre parce que c’est le mandat que j’ai reçu du peuple et parce que la France en a besoin. Mais je le ferai avec tous les Français. « 

On ne peut que remarquer que ce peuple français, déjà, n’a pas choisi à proprement parler le changement. La moitié de ce peuple a choisi les discours conservateurs-étatistes de Sarkozy, et l’autre aura choisi les discours collectivistes flous de Royal. En terme de changement, il y a plus rock’n’roll. Mais bon, soyons honnête : l’offre de changement, en soi, n’était pas non plus florissante. Bref : se posant, au début de la campagne, en candidat de la « rupture », nous n’avons plus le droit, maintenant, qu’à du « changement ». On aurait pû s’attendre à un vent de renouveau, ce sera une brisounette gentille. On s’attendait à du gros-oeuvre et de la maçonnerie, on va changer les rideaux et repeindre les volets…

La suite du discours permet d’apporter un éclairage supplémentaire à la nature de la petite brise en question :

« Je veux lancer un appel à nos partenaires européens auxquels notre destin est profondément lié pour leur dire que toute ma vie j’ai été Européen, que je crois profondément, que je crois sincèrement en la construction européenne … »

puis

« Je veux lancer un appel à nos amis américains pour leur dire qu’ils peuvent compter sur notre amitié renforcée dans les tragédies de l’histoire que nous avons affrontées ensemble. (…) Et qu’une grande nation, comme les Etats-Unis, a le devoir de ne pas faire obstacle à la lutte contre le réchauffement climatique, (…) La France fera de ce combat son premier combat.(…) Je veux lancer un appel à tous les peuples de la Méditerranée pour leur dire que c’est en Méditerranée que tout va se jouer, (…) que le temps est venu de bâtir ensemble une Union méditerranéenne (…) Je veux lancer un appel à tous les Africains, (…) Je veux leur dire que nous allons décider ensemble d’une politique d’immigration maîtrisée et d’une politique de développement ambitieuse. »

A ce point-là, on peut retenir ceci : notre nouveau président aime l’Europe, aime les Etats-Unis, les Africains, les Méditerranéens et, par dessus tout, se mêler de leurs affaires. Il adore déjà se faire à l’idée qu’il va intervenir pour favoriser le réchauffisme, qu’il va favoriser l’interventionnisme dans des pays déjà ravagés par des décennies d’interventions occultes ou officielles, qu’il va favoriser l’empilement de structures étatiques et « métastatiques » tant en Europe qu’au-delà, bref qu’il va étendre autant qu’il le pourra les gros doigts boudinés de l’Etat Fraônçais dans les sphères où il n’avait jusqu’alors qu’un rôle modéré.

Par moment, on peut regretter que le déclin de la France ne soit pas plus rapide et plus consommé : il donnerait certainement plus d’humilité à nos dirigeants qui pourraient enfin et avant tout se consacrer à ce qui se passe chez nous avant d’aller se mêler des affaires des autres. D’autant que les résultats intérieurs, comme bien souvent, ne permettent vraiment pas de se poser en donneurs de leçon.

Jusqu’ici, notre Nicolas National nous propose donc une brisounette et du De-Quoi-J’Me-Mêle.

En terme de changement, il y a vraiment plus rock’n’roll. A la limite, on pourrait se dire que ces impressions sont le fruit d’une interprétation trop rapide d’un discours écrit sous le coup de l’émotion, un soir de mai, et sous l’emprise de Champagnes un peu trop forts. Ca peut arriver. Or, on apprend quelques éléments qui, malheureusement, ne nous permettent que de valider notre première impression.

Ainsi, dès son premier jour à l’Elysée, il a décidé d’entreprendre une discussion avec les partenaires sociaux à qui il proposera de tenir quatre « sommets » en septembre sur – accrochez-vous bien – l’égalité salariale hommes-femmes, le contrat de travail unique, l’amélioration des conditions de travail et enfin la démocratie sociale. Lorsqu’on lit ce genre de chose, on ne peut que présager le pire.

L’égalité salariale homme-femme est un véritable serpent de mer, dont on ne voit toujours pas comment, en pratique, il peut être mis en place. Sauf à imposer des grilles salariales sur l’ensemble des professions, je ne vois pas comment on peut obtenir quoique ce soit dans ce domaine. Mais là encore, on utilisera le Syndicalis Gesticulans et le Politicus Vulgaris pour occuper la scène médiatique. Il y a fort à parier qu’il ne ressortira rien de concret ici.

Le contrat de travail unique est encore un autre Machin à Bordel Turbo-compressé. A moins bien sûr de définir ce dit contrat a minima avec des clauses aussi vague qu’un programme socialiste de présidentielles, on ne voit pas comment faire rentrer sur le même bout de papier juridique des contrats temporaires, des contrats cadres, des contrats à temps partiel, etc… On peut accorder à Notre Président A Tous (debout messieurs dames, Marseillaise s’il vous plaît) le bénéfice du doute, et une Solide Imagination. Le contrat unique, vous ne pouviez l’imaginer ? Sarko l’a fait ! (ou le fera).

L’amélioration des conditions de travail et la Démocratie Sociale sont des bidules tellement vagues que ça ne mérite même pas réflexion. Fourrer en une même journée un truc impossible, un truc tellement novateur qu’on ne peut pas en imaginer le début d’intuition, et ces trucs aussi vagues relève tout simplement de la performance digne d’un Guiness Book. Il est vrai qu’Ensemble, Tout Devient Possible, mais il faudrait voir à ne pas pousser les lois de la physique au-delà du raisonnable sans claquer une ou deux dimension et risquer de se retrouver coincé dans un espace de Calabi-Yau.

Au bilan, sa première journée risque donc de se passer à grignoter des petits-fours avec les trostkystes et les communistes des principaux syndicats ; so much for my taxes, comme on dirait outre-atlantique.

Nul doute que l’agenda présenté est totalement pipeau, et qu’il s’agira surtout pour Notre Président de Tous Les Français (debout messieurs dames, Marseillaise s’il vous plaît) de tâter le terrain et mesurer la dose de Ricard qu’il faudra distribuer pour obtenir les grâces putatives de nos artisans-gréviculteurs.

A la limite, dit comme ça, ça fait moins peur. Mais pan!, le deuxième jour, il remet le couvert.

Il préparera pour septembre un « Grenelle de l’environnement » avec les ONG, les industriels et les partenaires sociaux. Voilà. C’est dit. On va nous réchauffer du Chirac, récupéré depuis les caves de l’Elysée où on l’aura entreposé en petits paquets propres, à l’abri de l’eau et de la lumière. Le souci avec les cacas produits à base de croquettes lyophilisées, c’est que réchauffés, ils puent beaucoup plus fort qu’en sachet.

Le mois de septembre va sentir la croquette digérée réchauffée.

…

On dit qu’un homme politique, pour faire ses preuves, dispose d’un gros bloc de 100 jours. Si, pendant cette centaine de jours, il n’a rien pu faire, il y a fort à parier qu’il ne fera plus rien d’autre ensuite.

Pendant ce laps de temps (qui couvre, rappelons-le, un mois à trous – mai – , un mois croupion – juin – et deux mois de vacances – juillet et août -), le petit Nicolas devra donc faire passer quelques trucs marquants. En Septembre, tous ceux qui auront vaguement laissé passer ses frasques de l’été se réveilleront et lacheront la purée.

Compte-tenu du temps -100 jours!- imparti, nul doute que les mesures seront des broutilles face à ce qu’il faudrait faire pour réellement relever le niveau d’un pays qui n’en finit pas de rayonner par son arrogance, son décalage avec la réalité et sa santé de catarrheux cyclothymique.

Si, en Septembre, le gouvernement et Nicolas 1er plient face aux mouvement sociaux qui ne manqueront pas de secouer le pays, nous aurons droit à un quinquennat particulièrement calme, quasi-chiraquien. Les jeunes enfarinés de l’UMP et les supporters naturels et joyeux du petit gars, qui voient dans leur leader un nouveau héros, en seront pour leurs frais.

Si, en Septembre, nous n’avons pas de mouvements sociaux, c’est que les mesures proposés sont tellement vides d’intérêt et de sens que nous aurons droit, par la suite, à un quinquennat particulièrement calme. Quasi-chiraquien. Les jeunes UMP etc…

La voie pour une réforme de ce pauvre pays est tellement étroite qu’elle ne laisse pas beaucoup de place à la tergiversation.

Décidément, Septembre va sentir la croquette réchauffée.